Catfish
Résumé: Un photographe newyorkais, Yaniv, reçoit un jour un colis contenant une peinture réalisée à partir d’une de ses photos. Intrigué, il découvre que celle-ci a été peinte par une petite fille de 8 ans, Abby, vivant dans le Michigan. Il devient petit à petit ami avec toute la famille d’Abby, et tout particulièrement avec sa demi-sœur Megan, avec laquelle il entretient une relation amoureuse à distance. Le frère et le meilleur ami de Yaniv décident alors de réaliser un documentaire sur cette relation amoureuse particulière. Mais les choses prennent un tournant étrange lorsque Yaniv commence à découvrir que Megan n’est peut-être pas ce qu’elle semble…
Catfish est un nouvel exemple de la façon dont une bande-annonce peut faire passer un film pour ce qu’il n’est pas. Présenté comme un mélange de documenteur et de thriller hitchcockien avec un final estomaquant et dérangeant, le film de Joost et Schulman n’est en fait rien de tout ça. Il s’agit tout d’abord bien d’un vrai documentaire sur une relation amoureuse particulière, et non d’un documenteur à la Paranormal Activity ou à la REC. Ensuite, il ne s’agit en rien d’un thriller, même si le film comporte une certaine dose de suspense. Est-ce pourtant un mauvais film? Non, pas du tout. Le marketing aidant, on se retrouve même plusieurs fois mal à l’aise devant le film, à attendre un retournement de situation ou une fin terrifiante qui n’arrivera jamais. On tremble par exemple pour les trois personnages principaux lorsqu’ils décident de se rendre dans le Michigan pour confronter Megan et connaitre la vérité, se demandant s’ils ne vont pas se retrouver dans une famille de bouseux consanguins psychopathes, ce qui évidemment n’arrivera pas. La vérité est beaucoup plus terre à terre, et finalement plus dérangeante, d’une certaine façon.
Sans vouloir déflorer le film, car la surprise fait partie de son intérêt, disons que celui-ci est finalement beaucoup plus attachant qu’un simple thriller, et se pose en témoignage de notre époque moderne envahie par Facebook, où n’importe qui peut se faire passer pour ce qu’il n’est pas. Et si le film met mal à l’aise, c’est plutôt parce qu’il révèle au grand jour la solitude et le désespoir de certaines personnes, et parce qu’il met en scène une étrange et triste histoire d’amour. Mais la grande force de Catfish, c’est certainement de présenter les faits sans juger, avec compassion et retenue. Le film aurait très facilement pu tomber dans la diatribe anti-internet, mais évite cela avec beaucoup de sensibilité en se focalisant sur l’aspect humain. Et le très joli final expliquant le titre du film permet d’apprécier celui-ci d’autant plus.
Certains seront forcement déçus d’avoir été trompés sur la marchandise, mais si on accepte de se laisser porter, on s’apercevra que Catfish est un joli film, attachant et doux amer, qui donne à réfléchir sur la place du virtuel dans notre monde, sans apporter de réponses toutes faites.
Note: 7/10
USA, 2010
Réalisation: Henry Joost, Ariel Schulman
Avec: Yaniv Schulman, Ariel Schulman, Angela Wesselman-Pierce
Pour Elle
Résumé: Lisa (Diane Kruger) et Julien (Vincent Lindon), un couple marié sans histoire, voit leur vie soudainement bouleversée lorsque Lisa est arrêtée pour le meurtre de sa chef. Condamnée à 20 ans de prison pour un meurtre qu’elle n’a pas commis, Lisa perd peu à peu espoir. Au bout du rouleau, elle fait une tentative de suicide lorsque sa dernière demande de réouverture du dossier est rejetée. Julien prend alors une décision radicale: s’il ne veut pas voir la femme qu’il aime mourir à petit feu, il va devoir la faire évader…
Impressionné par la maitrise du récent A Bout portant, je me devais de découvrir rapidement le premier film du duo Fred Cavayé / Guillaume Lemans, très récemment remaké par les américains. Pas de surprise, Pour Elle est tout aussi bon, voire meilleur que son petit frère.
Déjà dans ce premier film, Cavayé et Lemans remportent l’adhésion du spectateur grâce à une histoire simple et directe et à des personnages immédiatement attachants et travaillés, le tout couplé à une réalisation dynamique. En seulement quelques plans introductifs, Cavayé rend palpable l’amour qui unit les deux personnages principaux, et l’arrivée inopinée de la police dans cette belle harmonie sera vécue de façon viscérale par le spectateur. Certaines ficelles émotionnelles sont certes un peu grosses (le gosse qui ne veut plus parler à sa mère), mais cela fonctionne parfaitement et on ne peut s’empêcher de prendre fait et cause pour les héros. De plus, certaines petites touches personnelles permettent au film de respirer et aux personnages d’exister. On citera notamment la relation entre Julien et son père, toute en non dit et regards échangés. Diane Kruger est magnifique comme à son habitude, même si on la sent parfois peu à l’aise dans le registre de l’émotion, et Lindon dévore l’écran, dans le rôle de ce père désespéré de sauver l’amour de sa vie.
Le film est certes moins trépidant que A Bout portant, qui était plus porté sur l’action, mais Cavayé et Lemans arrivent tout de même à maintenir un bon suspense, notamment dans le dernier acte, lorsque Julien est oblige de hâter l’exécution de son plan. Un plan qui rappellera forcement les aventures de Michael Scoffield, en moins tapageur et surtout plus crédible. Le montage minutieux du film et l’enchainement implacable des événements prévus (le plan simple mais intelligent de Julien) ou non (l’intrusion stressante de la police dans l’équation) fait que l’on n’a pas le temps de reprendre son souffle. C’est donc pour l’instant un sans faute pour le réalisateur et son scénariste, et on espère que cela va encore continuer longtemps !
Note: 8.5/10
France, 2008
Réalisation: Fred Cavayé
Scénario: Fred Cavayé, Guillaume Lemans
Avec: Vincent Lindon, Diane Kruger, Olivier Marshall
Antibodies (Antikörpe)
Résumé: Sur un coup de chance, la police allemande capture le tueur en série qui faisait trembler le pays depuis plusieurs mois. D’abord coopératif, celui-ci refuse bientôt de communiquer avec les enquêteurs. Il finit par sortir de son mutisme lorsqu’un flic de campagne, rongé par une affaire non résolue, vient le trouver pour savoir s’il est l’auteur du meurtre en question. Les deux hommes vont bientôt se livrer à un véritable jeu du chat et de la souris…
Avant de partir pour Hollywood réaliser des remakes déguisés d’Alien et Event Horizon (Pandorum) et des navets horrifiques pour stars has been (Le Cas 39), Christian Alvart a obtenu son ticket pour les Etats-Unis en mettant en scène Antibodies, classique histoire de tueur en série. Enfin, plutôt que classique, on devrait même parler de déjà vue et revue, tant le film s’évertue à repomper sans vergogne tous les grands classiques du genre. On retrouve ainsi des pans entiers du Silence des Agneaux, d’ailleurs cité littéralement, pour le face à face entre le flic sans expérience et le tueur manipulateur, ainsi que de Se7en, pour la façon dont le tueur manipule et influence le pauvre flic. A tel point que le final d’Antibodies est quasiment un décalquage de celui du chef d’œuvre de David Fincher, mis à part qu’Alvart n’ose pas aller jusqu’au bout de son concept et termine son film sur un happy end niaiseux et bigot du plus mauvais effet (avec un deus ex machina des plus ridicules).
Dommage, car le film, malgré la mollesse de sa réalisation, comportait quelques bonnes idées. On retiendra principalement une scène d’ouverture plutôt bien emballée, et surtout l’idée de la contamination par le Mal (d’où le titre du film), lorsque le héros commence à péter un câble sous l’influence néfaste du tueur. Il faut quand même avouer que le pétage de plomb est assez limité, vu qu’il se contente de regarder un porno, casser une télécommande, tromper sa femme, et baiser celle-ci un peu violemment. Mais l’idée était intéressante et aurait mérité d’être plus développée au lieu d’être abandonnée en cours de route (le héros fait un petit tour à l’Eglise et ça va mieux !). Surtout que vues les grosses ficelles du scenario, on se demande comment le héros a pu tomber dans le panneau…
Antibodies est tout de même un peu rattrapé par la prestation des deux acteurs principaux, mais il vient confirmer qu’Alvart n’était déjà à l’époque pas spécialement pétri de talent ni d’imagination, comme le confirmera la suite de sa carrière…
Note: 4/10
Allemagne, 2005
Réalisation: Christian Alvart
Scénario: Christian Alvart
Avec: Norman Reedus, Christian von Aster, Andre Hennicke
Les Chemins de la Liberté (The Way Back)
Résumé: Vers la fin de la seconde guerre mondiale, en pleine dictature communiste, Janusz, un prisonnier de guerre polonais, est envoyé dans un goulag en Sibérie par les Russes. Conscient qu’il ne survivra pas longtemps sur place, il décide de s’évader, accompagné de plusieurs autres prisonniers. Leur périple leur fera traverser à pieds la Sibérie, le désert de Mongolie et l’Himalaya…
De retour sur les écrans de cinéma après une longue absence (Master and Commander date tout de même de 2003 !), Peter Weir continue dans le film d’aventure épique avec Les Chemins de la Liberte, histoire vraie d’un groupe de prisonnier du goulag qui ont parcouru plus de 6000 miles pour retrouver la liberté.
Avec ce nouveau long-métrage, Weir signe le grand retour du film d’aventures à l’ancienne, avec héros soudés et charismatiques, grands sentiments, et décors naturels impressionnant (le film est produit par National Geographic). Et il faut avouer que ça marche ! Le réalisateur a réussi à retrouver la formule magique qui semblait perdue depuis des années, noyée sous les effets spéciaux et explosions. Pour ce faire, il se contente de raconter une histoire simple, avec une aventure humaine prenante, et des personnages attachants. Pas de rebondissements insensés, ni de retournements de situation artificiels et tirés par les cheveux, pas de « traitre qui se retourne contre le groupe », juste des hommes normaux, portés par leur désir de liberté, qui réussissent l’impossible. Un souci du détail et du réalisme permanent (les maquillages sont à cet égard particulièrement impressionnants) font qu’il est impossible de ne pas éprouver un maximum d’empathie pour ce groupe d’aventuriers malgré eux.
Et qui dit film d’aventure humain, dit importance du casting. Là encore, c’est du tout bon, avec en tête de gondole Jim Sturgess en leader humble mais charismatique, et le toujours impeccable Ed Harris (dieu que c’est bon de le revoir dans un rôle de premier plan !), qui semble s’être totalement investi dans son rôle (il faut le voir vers la fin du film, amaigri et brûlé par le soleil). Colin Farrell est lui aussi excellent en petite frappe dangereuse apprenant petit à petit à faire confiance aux autres membres du groupe, et la lumineuse Saoirse Ronan (révélée au grand public par The Lovely Bones et Reviens-moi) apporte la touche féminine et humaniste qui manquait à ces hommes bourrus (c’est elle l’âme du groupe qui les soude et les force à abaisser leurs défenses). Même les autres membres du groupe, un peu moins développés, ont suffisamment de traits de profondeur pour qu’on éprouve de l’empathie pour eux et qu’on ne les oublie pas sitôt le film terminé.
Le seul minuscule reproche que l’on pourrait faire au film, c’est de présenter des personnages se serrant les coudes du début à la fin. Mis à part la légère méfiance du groupe envers le personnage de Colin Farrell, pas à un seul moment on n’a de véritable conflit parmi les héros, ce qui parait parfois un peu invraisemblable. Ceci étant dit, cela reste un défaut bien minime par rapport à la qualité du film.
Les Chemins de la Liberté est donc un très bon film, loin du mollasson Master and Commander, et qui renoue avec bonheur avec la tradition des grandes aventures épiques.
Note: 8.5/10
USA, 2011
Réalisation: Peter Weir
Scénario: Keith R. Clarke
Avec: Jim Sturgess, Ed Harris, Colin Farrell, Saoirse Ronan, Mark Strong