Polly Morgan est une artiste anglaise née en 1980. Elle découvre la taxidermie à l’âge de 18 ans mais ce n’est que quelques années plus tard, en 2004, qu’elle décide de s’y essayer. Elle commence à prendre des cours pour apprendre la technique mais n’imagine pas alors que cette pratique va devenir son activité principale… Un jour, Bistrotheque, un bar-restaurant londonien à la mode lui commande quatre pièces pour son inauguration : « Cela m’a forcée à trouver ma propre esthétique et à réfléchir à comment je voulais présenter mon travail, au lieu de simplement reproduire l’habitat naturel de l’animal, » explique t-elle.
Morgan pensait que cette soirée d’inauguration serait de moindre ampleur mais finalement, la moitié du milieu de l’art s’y était donné rendez-vous. Ce soir là, elle est approchée par Banksy, bien qu’elle ne sache pas à qui elle avait affaire à l’époque. Banksy se montre très intéressé par son travail et commence à s’enquérir du prix des œuvres : « Je n’en avais aucune idée donc j’ai dit 900£, au hasard.» Quelques mois plus tard, elle le rencontre à nouveau, à l’occasion de la Zoo Art Fair à laquelle elle participe, et ce dernier lui demande de prendre part à sa prochaine exposition, intitulée Santa’s Ghetto. Suite à cette expo, la demande explose et Morgan doit quitter son emploi de serveuse pour se consacrer à plein temps à ses œuvres.
Le travail de Polly Morgan en lui-même est minutieux, sombre, et poétique. Elle présente un rouge-gorge allongé sur un livre de prière placé sous un lustre minuscule, des inséparables regardant leur reflet dans de petits miroirs ; place un lapin blanc au fond d’un chapeau haut de forme ou bien un rat albinos roulé en boule dans une coupe de champagne. Exerçant sur le spectateur un mélange d’attraction et de répulsion, ses œuvres donnent à voir des animaux qui reposent en paix – littéralement. Plutôt que de reproduire le simulacre d’une vie animale, c’est bien montrer ce qui se passe après la vie qui intéresse l’artiste.
Les animaux que Morgan embaume sont tous morts de cause naturelle. Elle les récupère auprès de gardiens de zoo, de vétérinaires, de propriétaires de fermes et de volières. Il est nécessaire pour l’artiste de se détacher émotionnellement des animaux dont elle se sert pour réaliser ses œuvres. Elle serait incapable par exemple de manipuler un animal qu’elle a connu, car cela ajouterait une dimension sentimentale inconfortable avec laquelle elle n’est pas prête à se confronter. Elle ajoute : « J’ai un chien comme animal de compagnie et je ne m’aventurerai pas près de lui avec un scalpel lorsqu’il sera mort. »
A ceux qui clament que son travail est funeste, Morgan répond qu’elle n’est pas une personne morbide : « Je suis en réalité quelqu’un de vraiment optimiste. Je déteste le fait que la mort plane au dessus de nous toute notre vie.»
+