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Le livre du jour - Ce qu’aimer veut dire, de Mathieu Lindon

Par Benard

Rédigé parVirginie Troussier, le mercredi 23 mars 2011 à 12h16

Quelle audace de titrer son dernier livre « Ce qu’aimer veut dire », avec cette prétention implicite de vouloir apporter une réponse à ce qui d’ordinaire, semble trop compliqué pour s’y frotter. Grâce à un témoignage intime, d’une pudeur sans égale, Mathieu Lindon réussit sublimement à le faire, en nous piquant au cœur.

Il est le fils de Jérôme Lindon, éditeur des Éditions de Minuit, livres aux petites étoiles sur le côté, que Mathieu reconnaît de loin dans toutes les bibliothèques.

Le livre du jour - Ce qu’aimer veut dire, de Mathieu Lindon
À 23 ans, il s’installera Rue de Vaugirard, chez Michel Foucault, et à l’opposé du fameux aphorisme de La Rochefoucauld, il connaîtra l’amour, sans le savoir, parce qu’il n’avait «jamais entendu dire que l’amour pouvait être ça».

De cet ouvrage, qui est avant tout un livre d’hommes, guidé par une divinité permanente appelée littérature, se dégage un privilège exotique, provoqué par le confinement de ce milieu intellectuel. Dans ce vase clos, les noms Foucault, Guibert, disparaissent derrière des Michel, Hervé, plus familiers et proches de nos sensibilités. L’auteur se décrit à travers son lien aux autres. Michel Foucault paraît alors si accessible et généreux que cette lecture nous transporte aussi, rue de Vaugirard, sous opium.

Les singularités des relations sont soutenues par leur originalité. La drogue est évoquée de manière déculpabilisée ; rue de Vaugirard l’acide est une fête, les portes semblent ouvertes pour l’éternité.

«Quand l’amour dure, est-ce encore de l’amour ? Quand c’est enfin devenu ce qu’il y a de meilleur au monde».

Des années plus tard, le sida emporte Michel, puis d’autres.

Alors, cette page, on la tourne aussi, avec lui, concrètement, on entame un nouveau chapitre, plus froid, plus dur. La mort entre presque dans l’ordre des choses, et ce qu’il y a alors de plus violent, c’est le temps.

Mathieu Lindon aurait aimé, dit-il, que son père et Michel, puissent lire ce livre avec émotion, mais il en est ainsi. Au-delà d’un livre hommage, c’est un livre-épicentre, où l’amour prend une forme presque palpable. Il n’est plus question de percevoir une facette du cœur (amour filial, charnel, fraternel) mais plutôt d’assembler toutes les pièces d’un puzzle-amour.

Les dernières pages sont de petites pépites, qu’il serait bon de relire. Tel un Charlie Chaplin qui, en ouvrant pour la septième fois la porte reçoit la même poutre sur la tête, nous nous ferons surprendre à chaque fois, par la délicatesse et la force de chaque mot.

Même les fins sont des douceurs.


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