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Pour l'amour du chocolat - José Carlos Carmona

Par Emmyne

41vbEYMij4L__SL500_AA300_Lausanne 1922. Le jeune Adrian Troadec, dix-huit ans, livreur de lait de son état, tombe amoureux de la jeune violoncelliste Alma Trapolyi. Pour la séduire, il s'essaie à la musique, sans succès; puis aux échecs. Il devient champion de Suisse et découvre par la même occasion le pouvoir du chocolat : sa force, son mystère, sa douceur. Adrian a trouvé sa voie et ouvre sa boutique, Le Petit Chocolat Troadec. C'est le début d'un empire.

De la Suisse des années 20 à l'Amérique du jazz, les personnages, de part et d'autre de l'Atlantique, traversent un krach boursier et une guerre mondiale, affrontent la maladie, l'adultère, le suicide et la mort. Mais quand rien ne va plus, il reste toujours le goût du chocolat...

- Editions Grasset - 2010 -

Le goût de ce chocolat, c'est celui de la nostalgie et de l'espoir. Ce roman, ce n'est ni la fresque d'un siècle turbulent, ni une grande et épique saga familiale même si trois générations s'y racontent.

La narration y est particulière, cent chapitres d'une dizaine de lignes à deux pages qui croquent les personnages en peu de phrases et pointent les mouvements d'un destin et les accords du coeur. Une partition en ellipse temporelle sans contretemps ni syncope servie par une plume affinée, une écriture comme je les aime, légère et subtile sans fioriture, une densité sobre relevée d'un soupçon de dérision, des phrases polies plus que laconiques ou dépouillées sur les courts chapitres comme ces actualités du début du siècle qui disent l'essentiel en quelques mots ajustés. Aucun développement dans ce récit, qui compose son tableau historique avec les coïncidences de dates entre moments de vie et évènements politiques et culturels mondiaux, un contexte en instantanés à la façon dont sont feuilletés d'anciens albums photographiques dont les clichés témoignent autant de la mémoire familiale que d'une époque. 

Une gourmandise douce-amère pour le plaisir.

Le ton et le style en extraits :

_ " Il avait sacrifié trois ans de sa vie pour connaître un homme qui, peut-être, lui donnerait le moyen de connaître une femme qui, peut-être, s'intéresserait à lui. "

_ " elle souriait, le grand piège avait fonctionné. Alma lui parla sans réticence, avec gaieté, sans tension ni complexe aucun, sans souvenir des persécutions passées. Adrian commença alors à se rendre compte qu'elle le traitait comme un ami parmi d'autres, comme un camarade. Et cette révélation l'accabla. Elle lui parlait - pensa-t-il - comme une femme qui appartient déjà à un autre. "

_ " Pour vivre, ils n'eurent pas d'autre idée que de se produire sur scène : George au piano et elle derrière un micro, ils parcourraient tout le pays si nécessaire, jusqu'à ce qu'ils deviennent riches. C'était leur rêve. Ils se produisirent d'abord sur toute la côte Est; puis ils partirent pour la région des Grands Lacs et chantèrent à Cleveland, Détroit et Chicago. On était fin octobre 1931, Al Capone venait d'être incarcéré pour fraude fiscale. Pour eux non plus, les choses n'allaient pas très fort. Ce fut à Chicago que Becki eut sa première fausse couche, et ils avaient tout juste assez d'argent pour survivre. La société américaine s'enfonçait dans une profonde dépression. Alors qu'ils habitaient Chicago, Franklin D.Roosevelt fut élu à la présidence des Etats-Unis et promit qu'aucun Américain ne connaîtrait la faim. "

_ " Le 3 septembre 1939, jour où la Seconde Guerre mondiale fut déclarée, Rebecca Sara Newton frappa à la porte des Trap. George  se contenta d'observer ses lèvres délicates et ses yeux lumineux, dans lesquels il lut : Je reviens vers toi. Mais ce qu'il ne lut pas, bien que ce fût plus évident, était que Becki revenait vers lui enceinte. Le 29 février 1940, jour de la première d' " Autant en emporte le vent ", naquit Eleanor. "

_ " Comment est-ce, l'Europe ? demanda un jour Eleanor à sa tante Alma. - C'est ancien. "

_ " Eleonor Trap ne pouvait comprendre pourquoi les gens continuaient à vivre s'il existait la possibilité de souffrir une douleur aussi profonde que celle du désamour. Dans une lettre du mois de mai de cette même année 1963, son oncle Adrian Troadec lui répondit qu'on continuait à vivre par lâcheté. Et par curiosité. "

- Traduit de l'espagnol par François Rosso - 196 pages ( petit format ) -

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- Le billet de Midola

Si vous désirez y goûter, ce roman peut devenir un livre-voyageur.

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