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La fabrique: de l'art conceptuel à Marseille (by Justine)

Publié le 02 mars 2012 par Lifeproof @CcilLifeproof

C'est assez énervée que j'ai découvert en lisant un article du New York Times, (traduit dans "Courrier International") que l'une des plus grandes collections privées d'art contemporain d'Europe se trouvait à Marseille. Le saviez-vous?

Marc et Josée Gensollen sont tous deux psychiatres et leur nom évoque une grande famille bourgeoise Marseillaise. Dans les galeries alentours, le couple collectionneur est connu du microcosme mais on n'en parle peu et on ne les rencontre que très très rarement aux vernissages. Comment suivre le petit train train de la création Marseillaise lorsque l'on est happé par les affaires du monde contemporain, le vrai, celui des grands messes internationales (foire de Bâle, Documenta Kassel)?

Là n'est pas mon propos. Je voudrais vous raconter ma rencontre avec quelques-unes de leurs œuvres, découvertes lors d'une visite très privée de leur lieu d'exposition (organisée par l'association des musées de Marseille) qui est aussi leur lieu d'habitation, la Fabrique. Comme son nom l'indique c'est un ancien bâtiment industriel transformé par l'architecte Harald Sylvander en temple dédié à l'art conceptuel.

Son propriétaire nous expose sa définition de l'art conceptuel: "l'objet n'est là que pour stigmatiser l'idée de l'artiste". La collection regorge de pointures, vous reconnaitrez les stars et les jeunes poulains:

: Michel Verju, Daniel Buren, Raphaël Zarka, Pierre Bismut, Liam Gillick, Dan Graham, Lawrence Weiner, Maurizio Cattelan, Jota Castro, Marion Tampon Lajarette, Stanley Brouwn, Sol Lewitt, Carl André, Saâdane Afif, Ulrich Rukriem, Monica Bonvicini, Sam Durante, Christian Boltanski, Claude Viallat, Claude Lévèque, Mario Mertz, Didier Faustino, Philippe Thomas...

A direct affront to a


natural waterway

Laurence Weiner, 1969

Lawrence Weiner, un des fondateur du mouvement d'art conceptuel, a vendu au couple une de ses oeuvres: « A direct affront to a natural waterway », (un obstacle direct à un cours d'eau naturel, 1969).

Une phrase, qui s'achète devant notaire, dont le certificat délivré atteste de son authenticité. Selon la volonté de l'artiste, l'acquéreur peut dès lors faire vivre l'oeuvre dans son imaginaire, ou écrire la phrase sur un support de son choix, ou encore en réaliser une interprétation en 3 dimensions, que ne contestera pas l'artiste.

Jota Castro Mother fucker
Jota Castro,2004, caisson lumineux, 180 x 120 cm

Face à l'escalier, une "oeuvre pute" comme le souligne Josée Gensollen. Il s'agit d'un caisson lumineux en polymirroir qui reflète le spectateur, sur lequel on peut lire la liste des plus grands collectionneurs d'art contemporain au monde. Parmi eux figurent quelques noms Français (3): Arnaud, François Pinault et... Marc et Josée Gensollen. Si l'oeuvre narcissique flatte l'égo des propriétaires, ils se font tout à la fois insultés dès le titre... oeuvre attractive et répulsive sans doute, qui parle assez bien de la complexité du rapport à l'art marchand.

Une autre oeuvre, "proto conceptuelle" (qui date de 1961) est attachante: il s'agit de 2 dessins encadrés estampillés "this way Brouwn". L'artiste Stanley Brouwn a demandé à deux passants de lui indiquer son chemin jusqu'à un musée, en faisant un petit plan. Les 2 plans sont évidemment trés différents mais doivent en théorie conduire au même point. C'est le mode opératoire qui intéresse l'artiste, la "topographie existentielle de chacun, avec les meilleures intentions".

Ainsi durant la visite qui a duré certainement plus de 3 heures (je n'ai pas pu rester jusqu'au bout pour cause de nounou), des phrases notées sur mon carnet me laissent un peu perplexe:

" Trés peu de concession à la peinture. Devoir de mémoire de l'espace, héritage post-Duchampien, comment faire un beau dessin après l'histoire de l'art? Fiction narrative, cénesthésie, mise en place d'une procédure, vicissitudes de la société contemporaine, représentation mentale, l'œuvre d'art est un rendez-vous, le certificat fait l'authenticité de l'oeuvre, faire l'acquisition, télescopage de la bi-appartenance à la culture juive et catholique, dimension participative, interactive avec le collectionneur, mythologie personnelle, etc."

Nous sommes dans le monde immatériel de grands penseurs très ouverts sur leur temps les artistes et l'art, qui comprennent parfaitement ce qu'écrit Artpress. Malgré la gentillesse de Monsieur Gensollen, sa conviction pour nous expliquer chaque œuvre dans le détail et un discours clair qui traduit une totale adéquation avec sa collection, je me suis sentie bien petite, mal à l'aise, inculte. J'avais hâte de retrouver ma maison-foutoir, mon petit boubou et les photos de ma famille sur le réfrigérateur. C'est grave docteur?

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Pour aller plus loin: l'article du New York Times page 22:

http://www.marseilleexpos.com/pac/revuedepresse_2011.pdf

Les échos:

http://archives.lesechos.fr/archives/2007/LesEchos/19950-524-ECH.htm

Observatoire de l'art:

http://observatoire-art-contemporain.com/revue_d_analyse/analyse_a_decoder.php?id=20070059


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