De temps en temps, il faut revenir aux fondamentaux.
Sauf si on est américain ayant l'habitude, à la sortie du boulot et avant de retrouver sa famille, d'écluser quelques grands verres de chardonnay aux comptoirs favoris, la très vaste majorité des vins consommés se fait à table.
Et sauf cas exceptionnels de bouteilles rares ouvertes pour des amis amateurs, le vin est juste ouvert, à la sortie de la cave de préférence, - c'est à dire à juste température - avant le dîner ou le déjeuner.
On considère ici comme épiphénomène les plus rares moments où ce sont des dégustations comparatives organisées.
Et la consommation de vins en restaurants est une confirmation évidente de ces postulats !
Or, que constate t'on dans la critique ?
La vaste majorité des critiques, pour ne pas dire la totalité, note des vins dégustés per se, en soi. Et, compte tenu du travail qu'ils ont à faire pour bien remplir leurs supports papier, ils les notent en série, donc sur une base comparative.
Il y a là un sérieux biais car, on le constate tous, un vin à table peut être sensiblement apprécié d'une toute autre manière que seul ou parmi d'autres. Il est là en situation réelle d'une symbiose, d'un mariage où il peut être le cocu d'office, ou le maître à bord, alors que l'idéal est naturellement celui d'un respect réciproque du vin et du mets.
Là, sur ce plan du comportement du vin à table, l'internet taille de belles croupières aux journaux professionnels. On trouve souvent des rapports "vins-table" qui ont un réel intérêt, pour autant qu'ils soient écrits par des plumes modestes, ayant de réelles connaissances et sachant exprimer un sentiment compréhensible par autrui.
Combien de fois avons nous tous constaté à quel point un vin pouvait changer à table ? La semaine dernière, dégustation à la Villa d'Este du Corton-Charlemagne 2006 du Domaine Bonneau du Martray, qui sera servi sur l'entrée du dîner de gala, avec le Clos Sainte Hune 2006. Dégustation avec les deux sommeliers de Villa d'Este, Angelo et Paolo, sur 3 plats différents proposés par le chef. A l'ouverture de la bouteille, le vin donne immédiatement une finesse, une rondeur de classe, une signature évidente d'un grand vin. Mais sur les saint-jacques et les scampi, généreusement placées sur une petite purée très légèrement citronnée, c'est devenu totalement autre chose. Les arômes fins de beurre frais, une complexité absente sur le vin seul, une longueur en bouche de toute beauté, tout cela a magnifié le vin. Et au bout d'un simple petit quart d'heure, ce fut encore autre chose. Par contre, sur le troisième test, un mets solidement marqué par la truffe (Ombrie), là, le mariage était un peu out. Comme quoi…
Bref, tout cela pour dire qu'il faut prendre quand même avec des pincettes tout ce qu'on lit sur un vin. Et je ne reviens pas sur notre autre habituel marronnier, à savoir les conditions de conservation du vin, sachant fondamentalement le vin est quelque chose qui vit !