L’Etrange Pouvoir de Norman (Paranorman)
Résumé: La ville de Blithe Hollow, dans le Massachussets célèbre tous les ans la pendaison d’une terrible sorcière ayant maudit ses persécuteurs plusieurs siècles auparavant. Dans cette ville vit Norman, un jeune garçon solitaire possédant un pouvoir particulier, celui de communiquer avec les morts. Un pouvoir qui lui pourrit la vie et fait de lui l’exclu de son école. Mais un jour, l’oncle de Norman vient le trouver pour lui expliquer qu’il doit prendre sa succession et protéger la ville de la terrible malédiction de la sorcière…
Nouvelle production du studio Laika, déjà à l’origine de l’extraordinaire Coraline d’Henry Selick, L’Etrange Pouvoir de Norman continue dans le registre du film en stop motion pour enfants. Mais comme Coraline, ce nouveau film ne prend pas les enfants pour des idiots et va à contre-courant des productions lisses et aseptisées généralement proposées à ce genre de public.
Avec une ouverture reprenant les codes du grindhouse dans une savoureuse parodie de films de zombies, L’Etrange Pouvoir de Norman affiche immédiatement sa différence et son refus des conventions. Le film mêle rapidement et avec bonheur comédie et horreur, dans un cocktail explosif qui fera certainement hurler les parents pensant voir un nouvel Harry Potter ou un décalque des Noces Funèbres, mais qui ravira certainement leurs bambins et les fans de cinéma de genre. Il faut avouer que le film va parfois très loin pour une production de ce genre, montrant par exemple la « lutte » entre Norman et le cadavre de son oncle dont les mains sont solidement serrées sur le livre dont le jeune héros a besoin. Les références (aux films de zombies bien évidemment, mais aussi aux productions Universal et Hammer, et même au slasher) sont très nombreuses mais ne viennent jamais empiéter sur un scénario de prime abord classique mais recelant de nombreuses surprises.
Une liberté de ton salutaire, mais aussi soutenue par des choix visuels audacieux. Le choc visuel est d’ailleurs un cap à passer, le design particulier des personnages, dont les défauts physiques sont grandement accentués, pouvant de prime abord rebuter. Mais la magie opère très vite, grâce à une animation sans faille (le film est d’une fluidité rare, même dans les moments de bravoure), couplée à une réalisation inventive et d’un dynamisme rare (la folle poursuite en van restera un morceau d’anthologie mémorable) et un soin réel apporté au look général du film (beaucoup de couleurs saturées, de nombreux jeux sur les ombres…).
Enfin, le dernier point achevant de faire de L’Etrange Pouvoir de Norman un grand film (et pas seulement un grand film pour gosses), réside dans son scénario ciselé et sortant des sentiers battus. Le soin apporté au développement des personnages est évident et rend ceux-ci immédiatement attachants (même les personnages secondaires ou a priori haïssables), et le scénario n’hésite pas à prendre plusieurs virages à 180 degrés pour asséner plusieurs vérités bien senties. Car en plus d’être une sympathique comédie fantastique pour gosses, L’Etrange Pouvoir de Norman est aussi un drame assez poignant sur la folie du fanatisme et les extrémités auxquelles la peur peut pousser les meilleurs des hommes. Des réflexions très adultes mais essentielles et à la portée universelle, à une époque où les médias et les gouvernements jouent constamment sur la peur de l’inconnu de la population. Pas mal pour un simple « film pour gosses » !
Note : 9/10
USA, 2012
Réalisation : Chris Butler, Sam Fell
Scénario : Chris Butler
Avec: Kodi Smit-McPhee, Tucker Albrizzi, Anna Kendrick, Casey Affleck, Christopher Mintz-Plasse, Leslie Mann, Jodelle Ferland, John Goodman
Frankenweenie
Résumé: Jeune garçon rêveur, Victor passe tout son temps à tourner des films en super 8 avec son chien Sparky, son seul vrai ami. Ainsi, lorsque Sparky meurt sous les roues d’une voiture, Victor n’a qu’une idée en tête, le ressusciter. S’inspirant d’une expérience de son cours de physique, il utilise l’électricité pour ramener son cher toutou à la vie. Une prouesse qui malheureusement ne sera pas sans conséquences.
Drôle de parcours que celui de Tim Burton qui, après avoir fui Disney au début de sa carrière pour pouvoir donner libre cours à ses idées morbides, a fini par revenir dans le giron de la firme aux grandes oreilles pour recracher depuis quelques années des recyclages sans âme de ses premiers films. Avec Frankenweenie, version longue d’un de ses premiers courts métrages, Burton tient pourtant l’opportunité de boucler la boucle et de faire la nique au studio, tout en revenant à ses premières amours.
Une occasion en or, que le réalisateur saisit visiblement à bras le corps, imposant sans vergogne son style et ses idées : réalisation en stop motion, film en noir et blanc, nombreux hommages rétros aux films de son enfance, intrigue pas forcément tout public (on parle ici du traumatisme enfantin généré par la perte d’un animal de compagnie), bref Burton semble enfin être revenu aux affaires après ses derniers mauvais films et le moyen Dark Shadows. Et en effet, il est difficile de bouder son plaisir devant cette bande réjouissante dans laquelle le réalisateur d’Edward aux Mains d’Argent semble enfin avoir retrouvé un peu de sa superbe.
Tout d’abord, Frankenweenie est esthétiquement très réussi, Tim Burton utilisant avec aisance le somptueux noir et blanc pour recréer plusieurs scènes mythiques de divers classiques (les deux Frankenstein de James Whale en tête). Les références font mouche, et l’humour aussi même si on ne rit pas franchement aux éclats. Certaines trouvailles font mouche (le hamster zombie, le chat devin qui fait des prédictions à l’aide de ses crottes), et quelques personnages secondaires savoureux remportent l’adhésion (le professeur de sciences doublé par Martin Landau, la gamine flippante avec son chat). L’intrigue manque légèrement d’originalité et de rythme, mais le film se rattrape largement de ce côté-ci dans un final assez dantesque mêlant film de monstre géant japonais (Gamera est directement cité), hommage aux classiques d’Universal (la foule en colère attaquant le moulin dans lequel s’est réfugié le « monstre ») et même une citation assez étonnante des Gremlins de Joe Dante (avec les créatures aquatiques attaquant la fête foraine et le « chat-rat » évoquant le gremlin-gargouille).
Cependant, Frankenweenie souffre de quelques défauts récurrents des films récents de Burton, à commencer par des personnages finalement peu attachants. Mis à part le héros Victor et son chien Sparky, les personnages secondaires n’ont absolument aucune épaisseur, et leurs motivations ne sont jamais explicitées. Production Disney oblige, on sent aussi parfois que le film est quelque peu édulcoré pour ne pas heurter la sensibilité du jeune public. On est bien loin du récent L’Etrange Pouvoir de Norman qui d’une part développait d’excellent personnages secondaires, et d’autre part révélait une profondeur inattendue et posait de difficile questions sur des sujets brûlants. La comparaison entre ces deux films ne tourne donc pas vraiment à l’avantage du Burton, d’autant que l’animation de Frankenweenie parait parfois un peu raide et que la palette d’expressions des personnages est assez limitée par rapport à son challenger.
Frankenweenie reste tout de même une bonne surprise après toutes ces années de films ratés pour Burton et après un Dark Shadows bancal mais attachant permet de retrouver un peu d’espoir quant au futur de la carrière de Tim Burton.
Note : 7/10
USA, 2012
Réalisation : Tim Burton
Scénario : Leonard Ripps, Tim Burton
Avec: Catherine O’Hara, Martin Short, Martin Landau, Winona Ryder, Robert Capron
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