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Devinettes gourmandes au fond d'une cave

Par Eric Bernardin

Suite à des échanges dans mon forum d'amateurs de vins favori, je me suis retrouvé invité par Jean-Loup à un repas-dégustation ... dans sa cave ! J'avais déjà mangé dans des chais à plusieurs reprises, mais jamais dans la cave d'un particulier. Mais bon, lorsque vous verrez les photos,  vous  verrez que la mécanique est bien rodée ;-)

Le principe est simple : un plat, un vin. Il faut découvrir le vin. Pas forcément le domaine et l'année. Mais au moins le cépage dominant et la région, voire l'appellation. C'est parti !

Devinettes gourmandes au fond d'une cave

Le premier vin a des bulles. Assez discrètes car le vin a été carafé. La robe est d'un beau jaune paille. Le nez fleure bon la noisette grillée limite pralinée, la brioche et une touche de fruits secs. On peut déjà supposer que c'est un Chardonnay. La bouche le confirme. Il y a une fraîcheur et une tension qui signent le cépage. Sans parler d'un "trait de vert" qui donne du peps en finale. Probablement un blanc de blancs.  Par contre, difficile de donner un âge car cette cuvée semble marier des caractères de jeunesse et d'évolution.

C'est normal, cette cuvée Blanc de blancs "Caudalie" de la maison de Sousa est issue d'une "solera" qui inclue une dizaine de millésimes successifs.

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galettes de pommes de terre

Nous poursuivons pas un blanc sec qui a au départ des arômes terpéniques qui vont s'atténuer au profit du citron confit et de la pierre humide. En ne faisant que sentir, j'étais parti sur un Riesling. Mais la bouche trop ronde  – quoique fraîche – n'a pas cette colonne vertébrale acide des vins issus de ce cépage. Itou pour un chenin. C'est forcément autre chose. Mais quoi ? Ma voisine souffle Vermentino... et Jean-Loup lui dit qu'elle a raison. C'est en effet un Clos Canarelli 2008 (vin corse) 100 % Vermentino. Bravo à elle !

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Filet de rouget "à la provençale"

Le troisième vin est toujours blanc, et fort différent du précédentLe nez est très expressif sur des fruits exotiques (mangue), la pomme rôtie au beurre, et quelques notes toastées. Lorsqu'il sera bien aéré, il deviendra plus austère avec des notes citronnées et minérales. La bouche est ample, avec une  matière dense et fraîche donnant la sensation de solidité. La finale est nette, avec un côté pierreux. Ce qui fait pencher certains sur Chablis, et ils ont raison : Chablis Grand Cru Château Grenouille 2004.

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 Blanquette de lotte aux poireaux 

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Nous passons ensuite à un premier rouge servi dans une carafe spectaculaire. Au départ, le nez fait très médoc (sous-bois, cèdre, fruits noirs) puis part plus sur la cerise. En bouche, ça ne peut être un Médoc. C'est rond, soyeux, frais .... et ça pinote grave ;-) La finale est tout de même assez virile pour un pinot bourguignon. Du coup, je me hasarde sur un Morey Saint-Denis. Ouf, c'en est un : Morey 1er cru "les Charrières" 2003 d'Alain Michelot.

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 Terrine de lapin

Le deuxième fait encore très Médoc au nez, et ça persiste à l'aération : havane à donf', du cuir, de la truffe et un peu de cassis mentholé. La bouche confirme le nez : c'est droit, tendu, avec des tannins très bien fondus. L'ensemble est parfaitement équilibré, à point. Je penche pour un Saint-Julien d'une dizaine d'années. Ben non, c'est Mouton-Rothschild 1990. À peu près tout les spécialistes s'accordent à dire que le domaine a raté son millésime.  Je confirme : c'est bon,  mais indigne d'un 1er GCC dans un millésime exceptionnel.

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À noter la phrase inhabituelle au-dessus de l'étiquette. En fait, Francis Bacon est mort en avril 1992, soit juste deux mois avant l'embouteillage. Cet hommage à un récent défunt est donc logique. 

Le nez du vin suivant fait toujours penser à un Médoc, mais la bouche dégage une énergie incroyable, avec une matière séveuse, concentrée, limite résineuse... qui déclenche l'admiration ou la stupeur. La finale est incroyable de puissance  et de longueur. Un vrai petit monstre... que j'ai nommé 10 mn avant lorsque l'on échangeait sur les belles réussites sur Pauillac en 1990. Eh oui, Jean-Loup nous a collé Lynch-Bages 1990 !!!  Merci à lui !

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Magret de canard et (délicieux!) cannelé salé

Le quatrième vin est totalement différent : le nez très épicé, avec des notes de cuir chaud, de grillé, d'herbes sauvages. L'attaque en bouche impressionne par sa tonicité et son côté tranchant. Suit une très belle matière superbe dense et charnue, avec une fraîcheur évoquant l'eucalyptus.  Finale très expressive, sans dureté aucune. Pour moi, c'est Syrah et Languedoc ... Il n'y a alors pas 50 solutions : Syrah Léone 2002. Un gros bravo à Marlène Soria !

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Daube aux olives noires

À peine remis du choc Soria, v'là-t-y pas qu'il nous sert un vin encore plus fou dont je trouve le nez divin, alliant finesse et fraîcheur, sur la gelée de fruits noirs, les herbes du marquis, le poivre fraîchement moulu. Pas de doute, c'est encore une Syrah. La bouche est raccord avec le nez, fraîche, fine, tendue comme pas permis, avec une matière faite de la plus belle soie. J'adore. C'est étranger, nous dit-on. Ca peut pas être australien ... donc c'est suisse ! Tout à fait : Quintessence 2005 de Benoit Dorsaz. Encore un bravo !!! (oui, je sais, ça fait beaucoup, mais c'est mérité).

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Plateau de fromages ... suisses !

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Démonstration par Nicole de la girolle à tête de moine

Nous arrivons aux douceurs, avec une carafe remplie d'un joli liquide doré, limité cuivré. Le nez évoque la marmelade d'abricot, l'écorce d'orange, avec une pointe de safran. Sémillon ! Bouche ample, avec une matière fraîche et onctueuse, sans lourdeur aucune. Finale abricotée à donf'. Un équilibre remarquable. Signé par un professeur en la matière, Denis Dubourdieu : Doisy-Daëne 2002.

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Enfin, pour finir, un liquide ambré qui exhale des notes de figues, de café, de pralin, de noix...  J'imagine bien un Pedro Ximenez, mais comme les Madères peuvent y ressembler, je vais tout de même goûter pour être sûr. C'est limite sirupeux, très sucré, même si c'est plutôt bien équilibré. C'est bien un Pedro Ximenez (les Madères sont moins sucrés). Probablement un Montilia Morilles. Mais pas un Toro Albala (plus noir et plus riche). Reste Alvear ... dont j'ai parlé en début de repas lorsque j'expliquai ce qu'était une Solera. Celle ci remonte à 1927.

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                        Merci à Jean-Loup et à Nicole pour leur super accueil !

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