Magazine Cinéma

Blancanieves

Par Tedsifflera3fois

Grand vainqueur des Goyas 2013, Blancanieves est la troisième réadaptation de Blanche-Neige qui sort sur nos écrans en un an. Et c’est de très loin la meilleure. Formellement ambitieux, porté par une Macarena García ravissante et hypnotique, le film de Pablo Berger explore l’intemporalité d’un conte de fée entre nostalgie et modernité.

Synopsis : Espagne, années 20. L’enfance de la belle Carmen est hantée par la présence fantomatique de son père, ancienne gloire de la corrida, et par une belle-mère acariâtre…

Blancanieves - critique
D’un côté, un format à l’ancienne assumé. L’histoire se passe dans les années 20 et le film en reprend les codes cinématographiques : le muet, le noir et blanc, le 4/3. De l’autre, une réalisation résolument moderne entre prises de vue légères et aériennes et angles surprenants. Le montage renforce cette modernité : quelques séquences font tourner la tête, comme lorsque la grand-mère succombe à une attaque ou quand Blancanieves est parcourue peu à peu par un flot de souvenirs oubliés. Alors, la confrontation du noir et blanc et du mouvement stroboscopique donne au récit sa principale ligne de force, entre conte traditionnel et propositions nouvelles.

L’interprétation des acteurs est à mi-chemin entre l’expressivité poétique du muet et la vérité plus brutale du jeu contemporain. Très loin des inutiles adaptations sorties en 2012, Blanche-Neige est parfaitement revisité : un nain a disparu (drôle), la corrida marque le film de son empreinte, le miroir de la marâtre, ce sont les médias, l’image publique (responsable d’ailleurs de l’accident du père, sous la forme d’un flash d’appareil photo). Tous nous demandons quelque part à notre miroir si nous sommes encore les plus beaux, en apparence tout du moins.

Blancanieves est donc un jeu d’apparences et de filiation. Le torero tue pour le public, recevant la gloire en échange d’une geste héroïque. A l’opposé de ces miroirs déformants que sont les applaudissements, les photos, les journaux, il y a la transmission, le lien indestructible entre une fille et son père, les souvenirs qui s’opposent à l’oubli.

Blancanieves est donc une histoire d’héritage, de sentiments vrais cachés derrière les lumières du spectacle. The show must go on. C’est une corrida dont on peut sortir paralysé ou empoisonné. C’est un appareil photo devant lequel il faut poser avec le mort pour figer une dernière fois des ersatz de sentiments. Et souriez surtout. C’est un article de journal pour lequel il faut paraître, toujours paraître. C’est une roulotte itinérante de nains joyeux qui doivent séduire ou mourir. C’est pour finir un pathétique spectacle dans une foire. Comme avec le père, il y a encore et toujours du spectacle à créer, même avec des corps immobiles. La vérité se dissimule, on retient le sensationnel, le show est rendu au public.

Alors l’émotion nous prend. Blancanieves est un conte certes classique, mais il est emprunt de poésie et de cruauté. L’amour romantique suit le chemin de l’amour filial : il se réduit à des espoirs déçus, à des larmes qui traversent l’épais rideau de la mort.

Note : 7/10

Blancanieves
Un film de Pablo Berger avec Macarena García, Maribel Verdú et Daniel Gimenez-Cacho
Drame – Espagne – 1h44 – sorti le 23 janvier 2013


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Tedsifflera3fois 2088 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines