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Z comme Ze End

Par Clementinebeauvais @blueclementine
Hé oui, c'est déjà fini!

Z comme Ze End

déjà....fini???

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Ca va aller, ça va aller. Ca reste un billet, quand même, donc on va en profiter à fond, hein? Toutes les bonnes choses ont une fin... et ensuite... y en aura d'autres, des billets! 
Parlons donc, justement, des fins dans la littérature jeunesse.
L'une des choses qui distingue le plus la littérature jeunesse de la littérature 'adulte', c'est la fin. Il y a une attente spécifique, en littérature pour enfants, de fins qui, si elles ne sont pas complètement heureuses, soient du moins porteuses d'espoir. Ce n'est pas forcément un souhait catégoriquement exprimé par qui que ce soit - auteurs, éditeurs, parents, enfants - mais c'est plutôt une sorte de convention. Elle vient peut-être du fameux 'ils vécurent heureux'. Ou peut-être simplement du fait qu'on n'aime pas l'idée que l'enfant va refermer le livre et pleurer ou se sentir tout vide.

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Disney: Distilleur de fins à la guimauve depuis 1924

Mais il y a des fins qui, bien que porteuses d'espoir, sont ouvertes, extrêmement ambiguës, indécidables. On a par exemple la fin de Tistou les pouces verts, où Maurice Druon nous dit que Tistou est parti dans le ciel parce qu'il 'était un ange'. Mais qu'est-ce que ça veut dire?
Mini-Moi: Pouquoi il est pati dans le ciel pasqu'il était un zange?Ma mère: Ca veut dire qu'il est mort. Mini-Moi: *pleure* *ne relit jamais le livre* En fait, cette fin est ouverte à d'autres interprétations. Peut-être que Tistou n'a jamais été humain, donc que monter au ciel veut simplement dire qu'il rejoint sa 'vraie' famille là-haut. Peut-être qu'il est mort. Peut-être qu'il est parti en mission aider une autre ville. Avec ce genre de fin, on permet à l'enfant de ne comprendre que ce qu'il est prêt, psychologiquement, à accepter. 
On a aussi des fins qui changent tout à l'histoire: ce sont des fins façon nouvelle de Maupassant, qui créent une surprise énorme et font voir tout le livre différemment. Ces fins-là requièrent une seconde lecture pour assimiler tous les détails qu'on avait ratés. C'est le cas, par exemple, du génial Je n'irai pas, de Séverine Vidal.

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Allez, je vais pas lui spoiler son album, à la Séverine, mais quelques indices: c'est quelqu'un qui ne veut vraiment, mais vraiment pas du tout aller à l'école pour la rentrée. Les gens sont horribles! Les vacances c'est mieux! Je veux pas travailler! Mais quand on découvre, à la fin, qui est réellement ce personnage...

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Ce genre de fins façon 'blague' ou 'révélation' est extrêmement puissant pour parler avec humour et surprise des clichés et des préjugés. L'extraordinaire The Turbulent Term of Tyke Tiler, de Gene Kemp, raconte un trimestre agité dans la vie de Tyke Tiler, protagoniste hyperactif et aventureux. Tout le long, par un astucieux jeu de pronoms, le sexe du personnage principal n'est pas révélé et on a tendance à croire qu'il s'agit d'un garçon. Jusqu'au dernier chapitre... où le lecteur découvre que Tyke est une fille. Tout le monde le sait dans le livre, évidemment - c'est donc seulement au niveau de la lecture que cela crée la surprise, et on est conduit à repenser nos préjugés quant aux traits de caractère qu'on attend chez un 'héros' plutôt que chez une héroïne.Et puis il y a les fins franchement déprimantes et dont on ne se remet pas aisément, comme la fin de La guerre des chocolats de Robert Cormier, qui disent les choses comme elles sont: s'il y a de la violence à l'école, ça peut mal se finir. Sans être moralisante pour un sou, ce genre de fins est l'occasion de 'réveiller' le lecteur: tout ne s'arrange pas toujours, et la littérature reflète ces échecs-là.
Mais les fins véritablement sans espoir, complètement nihilistes, restent très rares en littérature jeunesse. Même dans les profondeurs terribles de la fin de Quelques minutes après minuit, de Patrick Ness - je ne spoile rien en précisant que la mère du jeune garçon finit par mourir d'un très long cancer - on peut quand même s'accrocher à l'idée que le travail de deuil a déjà commencé, que le héros s'en sortira, que les dernières semaines passées en compagnie du monstre raconteur d'histoires ont préparé le protagoniste à faire face à cette fin inévitable. 

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Warning, livre très, très dur...

Personnellement, j'adore les fins dites 'ouvertes' en littérature jeunesse, surtout chez les tout-petits. Mais elles sont difficiles à vendre. J'ai plusieurs récits avec des fins comme ça, ambiguës, douces-amères, et les éditeurs hésitent parce qu'elles peuvent parfois être effrayantes. La sécurité, c'est la certitude: c'est une fin qui fait ce qu'elle a à faire, c'est-à-dire tresser ensemble toutes les intrigues primaires et secondaires en une jolie résolution façon 'épilogue'.
La fin est toujours un reflet de ce que l'adulte souhaite transmettre à l'enfant. Le livre est-il un 'épisode de vie', fini, rangé, classé? ou une ouverture vers des évolutions futures? L'histoire doit-elle apprendre quelque chose à l'enfant, ou permettre d'autres apprentissages inconnaissables par l'adulte? Le livre doit-il refléter la vie dans toute son imprévisibilité et son amoralité, ou 'mentir par omission' en donnant du sens à ce qui n'en a pas véritablement? Toutes ces questions animent l'auteur quand il met le mot 'fin', et le lecteur quand il s'aperçoit qu'il est à court de pages et doit s'en contenter. 
Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses, je crois, juste différentes perspectives sur l'accompagnement de l'enfant par l'adulte. Jusqu'à où doit-on accompagner l'enfant? Jusqu'à où doit-on lui faire comprendre qu'un jour l'adulte mourra et qu'alors il sera tout seul? 
Sur ce joyeux rappel de notre propre finitude, je vous dis à très vite et je tire le rideau de cet abécédaire. Merci de l'avoir suivi!

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