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Enseignements d'Italie ... et du Poitou

Par Critikacid
C'est un fait qui restera dans l'histoire : pour la première fois depuis la guerre, il n'y a plus en Italie aucun député socialiste ou communiste -quelle que soit l'appréciation du contenu que recouvrent ces étiquettes. En plus du retour du "caïman" , Moretti dixit, au pouvoir, il n'y a donc plus à proprement parler d'opposition digne de ce nom en Italie. Exagération? Il suffit d'écouter Veltroni déclarer qu'il va constituer un "shadow cabinet" dont le but sera, je le cite "nous veillerons à ce que les promesses faites pendant la campagne électorale soient traduites en engagements réels de la part du gouvernement".
Comment en est-on arrivé là? Alors que durant la précédente legislature Berlusconienne, d'importantes mobilisations ont eu lieu contre sa politique, contre ses "réformes" ou contre la guerre en irak?
La première réponse coule de source : le gouvernement Prodi n'a en rien remis en cause la politique de son prédécesseur, et l'a même poursuivie dans la plupart des domaines. Il a donc écoeuré ceux qui avaient voté contre Berlusconi et sa politique il y a deux ans de cela.
Mais la seconde réponse a une portée française au possible.
Le nouveau "Parti Démocrate", battu, a affirmé sur tous les tons qu'il n'était "pas de gauche". On se souvient d'Aprile, le film de Moretti où ce dernier apostrophe Massimo D'Alema derrière son écran TV en lui intimant, désespéré, de "dire quelque chose de gauche", de dire quelque chose, tout court. La constitution du Parti Démocrate, fusion des ex du PC italien avec des morceaux de la démocratie chrétienne, c'est la formation d'un baillon politique plaqué sur toutes les bouches qui crient en Italie. Pas étonnant qu'une partie des ouvriers se soient même tournés vers la populiste et raciste ligue du Nord, seule à ne pas tenir un discours "politiquement correct".
Portée française, oui : puisque la question des alliances avec le Modem recoupe, dans des circonstances hexagonales, exactement le même projet politique que celui du P.D. - Ségolène Royal ne s'en est pas cachée d'ailleurs, vantant sur tous les tons les mérites selon elle de cette nouvelle formation. Eh bien, voilà ses mérites : faire revenir le mort-vivant ultra-bronzé aux UV à la présidence du conseil italien.
Mais dira-t-on, la "gauche radicale" a été elle carrément éliminée du parlement. Précisément. Elle aussi, sous des dehors "radicaux", a soutenu, même en grinçant, la politique de Prodi ces deux dernières années (jusque et y compris les élus de la LCR Italienne, les amis d'Olivier Besancenot). Elle le justifiait au nom de la lutte contre Berlusconi! Le bilan est facile à tirer...
Pis encore, elle est allée aux élections sous une drôle de bannière "arc-en-ciel", effaçant d'elle-même toute trace d'identité socialiste ou communiste. Résultat : elle a été incapable de capitaliser le rejet par lescouches populaires de la politique de Prodi, elle a refusé, même, de maintenir le drapeau qui symbolise malgré tous ses avatars la possibilité d'une politique réellement alternative.
Les leçons sont donc particulièrement claires, et sonnent comme un avertissement dans toute l'Europe, avertissement face à la liquidation en cours de tout ce qui fut construit par les mouvements d'émancipation du capitalisme lors du 20ème siècle, y compris les organisations qui en sont issues plus ou moins directement.
Et enfin, ajoutons-y une petite... raffarinade. Le dit Raffarin, utilisant la condamnation de Mme Royal pour licenciement abusif, a demandé que cette dernière démissionne de la présidence du conseil régional de Poitou-Charentes. Ca ne vous dit rien? En creux, cela devrait : quand donc le PS a-t-il exigé pour la dernière fois la démission de dirigeants de droite? La réponse est : sous Mitterrand.
Bien entendu, l'exigence n'est pas le fait. Mais exiger la démission de tel ministre, du gouvernement, du président, c'est se porter implicitement candidat au pouvoir, c'est remettre en cause la légitimité du pouvoir. Or Hollande, Royal et les autres expliquent aujourd'hui ... le contraire. Voilà pourquoi, tout comme Berlusconi, Sarkozy peut vivre assez sereinement  les turbulences actuelles de son quinquennat dont les dirigeants PS ne cessent de répéter qu'il devra se poursuivre jusqu'à son terme naturel, constitutionnel. Sereinement, donc, ... sauf intervention de la jeunesse, des couches populaires, dans la sphère où se décident les politiques menées, dans la sphère du pouvoir.
C'est à cela, en n'oubliant pas le fiasco épouvantable que l'Italie nous offre, qu'il faut travailler.



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