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Tenuta Argentiera en Bolgheri Superiore

Par Mauss
A l'invitation des propriétaires, la famille florentine Fratini (Marcello et Corrado), une visite de la propriété en Maremma pour le lancement d'un superbe livre racontant cette création ex nihilo d'un vignoble produisant, bon an mal an, autour de 400.000 bouteilles par an.

L'histoire de la création de ce domaine est assez ordinaire : une famille d'hommes d'affaires ayant particulièrement réussi dans la mode, le textile et plus récemment l'immobilier, a toujours gardé des liens avec la terre, liens alimentés par un Père transmettant son amour de la campagne à ses enfants.

En France, on a de multiples exemples ainsi d'hommes d'affaires, se lançant dans le dernier tiers de leur vie, dans la viticulture avec plus ou moins de succès. De Perrin (Cartier) à Cahors  à Decelle (Picard) à Jean Faure, on les compte par dizaines !

Bien sûr, vous allez dire in petto : quand on a de l'argent, c'est facile ! Oui et non. Quand on se lance ainsi dans un projet aussi vaste que l'Argentiera, on est à peu près certain de n'obtenir un éventuel retour sur investissement qu'au bout de deux décennies dans le meilleur des cas. Or, pour un homme d'affaires, devoir attendre aussi longtemps pour obtenir un gain de son placement, ce n'est pas forcément une grande motivation. Mais surtout, là où ces moguls de la finance ont généralement le contrôle de ce qu'ils font, dans le vignoble, ils dépendent de la météo, capricieuse à souhait et d'un produit qui est différent chaque année et devant alors trouver son marché. Bref : une leçon de modestie et de relativité des choses.

Il eût été bien plus facile pour la famille de multiplier d'autres investissements immobiliers à succès, comme la création du Four Seasons à Florence - un hôtel magnifique dont la revalorisation a pris 7 ans pour bien mettre en valeur toute la richesse cachée derrière de vulgaires panneaux mis en place par d'anciens propriétaires - , hôtel maintenant revendu à des investisseurs du Moyen-Orient. Une visite s'impose et la table est de premier ordre.

Et dans deux ou trois ans, ce sera au tour de Rome d'avoir un Four Seasons où la famille vient d'acquérir une vaste propriété, - là où on imprimait les billets de banque - sur plus de 75.000 m2.

Revenons au vin. Le site du domaine : ICI

On a évité ici l'erreur de croire qu'on pouvait rapidement obtenir des prix comparables aux deux propriétés phares de la région : Sassicaia et Ornellaia-Masseto. Certes, les plus belles cuvées avec encore des volumes confidentiels comme le 100 % merlot Bartholomäus, sont chères, mais les vins de base, qu'on peut acquérir directement à la boutique, sont à des prix plus que corrects, vu la qualité des vins.Tout se vend, et bien, au point qu'on vient de replanter 15 hectares pour pouvoir alimenter les marchés extérieurs comme les USA ou la Chine.

Stéphane Derenoncourt, conseil sur ce domaine, a parfaitement expliqué lors de cette journée, les caractéristiques de ce terroir où la mer si proche permet une belle aération des vignes bénéficiant par ailleurs d'un ensoleillement supérieur à celui de Bordeaux. Ici, en effet, les vins sont de type bordelais : assemblage de cabernets, merlot et petit-verdot. Avec aussi un peu de syrah pour certaines cuvées. Prochaine sortie : un 100 % cabernet franc qui devra faire parler de lui.

A chaque naissance de la génération des petits-enfants, la propriété crée un nouveau vin ! C'est dire ici à quel point la notion de "famille" est la base de tout. 

La propriété, qui s'étend de collines autour de 200 mètres d'altitude jusqu'à la mer où dansent gentiment des forêts de cyprès (écoutez Ottorino Respighi), est de toute beauté. Federico Zileri, le DG également propriétaire à Bolgheri, parle un français impeccable et saura vous accueillir "alla grande" (sur RV).

Les vins ? Le 2008 dégusté lors du déjeuner est actuellement le millésime qui se déguste mieux que bien. Le problème majeur reste de préserver une certaine fraîcheur à la bordelaise, alors même qu'il y a bien moins de problème à obtenir les maturités qui se construisent sur plus de 120 jours, tempo idéal pour les cabernets.

La France connait peu ces vins de la Maremma tant il est difficile pour l'amateur hexagonal de connaître ces vins qui ne trouvent pas de distributeurs à la hauteur. Oui, oui : on connaît la raison : ils vous disent - à juste titre - que lorsqu'ils font l'effort de lancer de tels crus en France, ce qui a un coût réel, les premiers acheteurs vont vite, ensuite, directement à la propriété ou chez des cavistes italiens, pour en acquérir d'autres millésimes à un prix forcément plus attractif : c'est là tout le problème de la distribution européenne. Même chose pour les grands vins allemands ou espagnols. C'est un fait qu'on ne peut pas oublier.

Le GJE qui a fait dans la région deux sessions majeures, une à l'hôtel Tombolo de la famille Antinori, propriétaire de la Tenuta Guado al Tasso, l'autre sur l'Argentiera, a d'excellents souvenirs de cette région, partie de rien, et qui a réussi, en quelques décennies, à s'implanter avec un succès rare, sur les grands marchés mondiaux. On peut chipoter sur le fait que ce sont plus souvent des vins de style international aux dépens de vins de terroir : oui et non. Il y a là, comme à Grattamacco ou surtout à Sassicaia, des vins dont les gènes sont vraiment locaux : finesse, équilibre, douceur tannique en finale et belle maturité.

Merci ne pas oublier qu'à la première session du GJE au St James à Paris en 1996, le Sassicaia 1985 est arrivé en tête, devant tous les premiers crus bordelais.

Ce que je retiens de cette visite : une formidable mise en oeuvre d'un paysage unique en Toscane où le respect de la nature est une prise en compte majeure des investisseurs. Ce n'est pas rien, de nos jours.

Merci à la Famile Fratini d'avoir créé ce domaine d'exception et de proposer des vins si bien réussis.

Si vous passez par là, n'oubliez pas leur olio di oliva : le compagnon parfait de vos pasta de retour en France !

QUELQUES PHOTOS POUR FAIRE JOLI

FRE

Corrado et Marcello Fratini : une famille passionnée par la terre, le vin, la Maremma

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Normalement, selon la lumière, on peut voir la Corse au loin. Oui, il faisait grand beau :-)

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Le livre publié sur cette aventure initiée il y a plus de dix ans.

 

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Federico Zileri, DG de la propriété

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Jeanette Servidio, une femme de poigne au commercial et organisatrice hors pair

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Le Chef Vito du Four Seasons : le brunch du dimanche est d'exception !

ziin

Zubin Mehta : enthousiasmant sur le Sacre du Printemps (Stravinsky)

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Stéphane Derenoncourt et Othmar Keim (GJE)

cuve

Qui a déjà vu une telle cuve ? 

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Harmonie entre les parcelles, les bois où gambadent des sangliers en attente d'Obelix, et la mer si proche


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