Magazine Cuisine

Une sollicitude amicale

Par Mauss

Un mien ami, suspectant - à juste titre - que j'allais passer quelques heures dans l'attente de mon vol de retour Singapour-Londres-Paris, m'envoie un lien vers un site briton où on dit plein de mauvaises choses sur les dégustateurs professionnels. C'est long, et c'est plein de bêtises.

ICI

Tout vient d'une erreur qui se répète si souvent un peu partout.

Il est évident - cela devient énervant de le répéter sans arrêt - que l'art de la dégustation est loin d'être une science exacte ou même approximative. Euphémisme majeur.

Donc, dire que même des grands noms peuvent confondre un grand cru (surtout quand il est mal vinifié) et un vin ordinaire (surtout s'il est bien fait), c'est enfoncer des portes ouvertes. Combien de fois Michel Bettane ne nous a t'il pas dit en session du GJE qu'il ne fallait surtout pas chercher l'identité du cru, mais simplement ses "+" et ses "-"'. L'approche du vin dans chacune de ces perspectives, est totalement différente.

Allons-y : expliquons nous pour nos amis du Guardian.

Principe de base : ne jamais confondre le travail d'un oenologue ou d'un master of wine (MW) qui est de dire au producteur quels sont les défauts de ses vins et éventuellement comment les corriger.

Le Dr Bonobo (qui pourtant ne rentre pas dans ces deux catégories) est assez bon en la matière : plus d'un producteur vous dira comment, très doctement il a appris à plus d'un grand nom l'art de faire le vin ! Jamais vu de solides gaillards piémontais ou bourguignons avoir été aussi patients devant de telles leçons de choses :-) Impressionnant, et surtout que le bougre, il fait sacrément dans le sérieux en de telles circonstances :-)

Corollaire : un critique de vin doit avant tout parler pour ses lecteurs qui veulent simplement savoir :

1 : si le vin est bon

2 : à quel point il est bon (plaisir, émotion)

3 : jusqu'à quel prix l'auteur est prêt à le payer pour l'encaver (pour bibi, un critère majeur de décision). Et comme ce n'est pas une profession qui encaisse mensuellement des revenus nets à 5 chiffres (understatement), soyons certains qu'ils font gaffe à leur portefeuille :-). On aura donc des évaluations plus que raisonnables et pourtant compréhensibles car eux, ils connaissent les lois du marché où l'étiquette joue un rôle ± majeur dans le montant du prix.

4 : éventuellement en rappelant quels sont ses habituels outils d'appréciation, quels sont les éléments du vin auxquels il attache une importance  ± forte. Bref, comme l'autre, qu'il nous montre sa trousse à outils.

C'est déjà là un sacré boulot. Mais bien trop souvent oublié par le critique qui, pour essayer de faire sérieux et donc abscons, se croit obligé d'utiliser un vocabulaire technique histoire de … vocabulaire mal copié sur celui des oenologues.

La boucle est bouclée : on n'en sort pas et on a donc périodiquement quelques britons nerveux ou fiévreux qui ont toutes les facilités du monde pour se gausser de ces zeus qui veulent la jouer technique et qui peuvent se planter, rarement en majesté, souvent en totale suffisance médiocre.

Un vrai critique est là pour nous apprendre le vin, pour nous dire quoi y rechercher, à quoi donner de l'importance, et comment construire son propre goût par l'expérience. Il n'est pas là pour mal redire ce que doit écrire un oenologue ou un maître de chai.

Le reste, c'est du pipeau de sansonnet.


Retour à La Une de Logo Paperblog