Ludovico de Luigi est né à Venise en 1933 et vient d’une famille d’artiste. Sa formation artistique atypique se déroule dans l’atelier de son père Mario, un peintre abstrait connu, dans une atmosphère culturelle ouverte à tous les courants innovateurs de la peinture contemporaine. La nature anti-conformiste de Ludovico De Luigi le pousse à rechercher une identité culturelle qui lui permette une synthèse picturale, un mélange fait d’un passé reculé, mais imprégné du présent.
Ses premières expositions remontent à 1965, année où il présente à la Galerie « Il Canale » de Venise, dans le cadre d’une manifestation qui lui est entièrement consacrée, deux oeuvres de grandes dimensions représentant sa ville natale, monumentale et menaçante, ruine envahie par des hordes d’insectes et de créatures fantastiques.
De Luigi réalise donc une peinture qui est un mariage alchimique des expériences passées entre elles, se rapprochant de la magie profane de Dali et de Chirico, fondée sur une tendance classique et un processus d’élaboration créative surréaliste tendu vers le futur.
Sa rencontre en 1968 avec le propriétaire de la galerie Barthoux, Luciano Ravagnan, va lui permettre de développer son activité à Venise, en Italie et à l’étranger. Il expose notamment à Trieste, Milan, New York, Munich, Monte-Carlo, Paris et, à partir de 1975, dans plusieurs villes d’Allemagne. Alliant védutisme et entomologie, il s’est imposé comme le prophète pictural des menaces qui pèsent sur Venise : inondations, pollution, technologie et consumérisme. Il donne de sa ville une vision à la fois surréaliste, catastrophiste, sensuelle et décadente.
Dans les années 80, Ludovico De Luigi a commencé à s’intéresser à la sculpture. Dans sa maturité, De Luigi rencontre sa seconde Muse après la Peinture, la Sculpture. Il réalise alors une série de prototypes et de bronzes figurant des chevaux imaginaires, des créations étranges à l’esprit onirique. Ses sculptures sont insérées dans contexte dense de symboles et d’allégories.
Réalisant un certain nombre de chevaux de bronze monumentaux inspirés par le célèbre quadrige de la place Saint-Marc et destinés à se substituer aux hideuses copies qui ornent aujourd’hui le frontispice de la basilique.
Les chevaux de De Luigi galopent désormais à Marseille, à St. Louis, à Chicago, à Denver, à Perth et à Bolzano. Il crée pour le carnaval de Venise de 1990 un gigantesque cheval en chocolat aux dimensions comparables. En 1999, il récidive, cette fois avec du verre, qu’il fait couler dans les fours de Murano.
L’avènement de l’ère électronique amène De Luigi à rencontrer son ultime Muse, fascinante "camera optica". Il se tourne vers les réalisations picturales informatiques. A partir d’un genre à l’apparence anachronique, celui des vues, De Luigi réalise par le biais des outils informatiques d’inexistantes "Vedutisti" de Venise. Il crée des "vues d’aujourd’hui d’une ville qui n’existe pas."
"Pour envoyer un message, il faut un médium qui corresponde au mot, pour envoyer un message pictural j’avais besoin d’un langage défini approprié. Il existait, profondément ancré en moi, une Venise qui m’appartenait, dans laquelle je nageais, que j’absorbais par tous les pores de ma peau et que je portais comme une matrice et une raison de vivre. (…) Je ne peux peindre une voie dans un style contemporain, mais je peux le faire dans le style de Canaletto, Guardi, Carlevaris ou Marieschi, usant leur langage, leurs signes: le désespoir dramatique de Marieschi, l’obsession transcendantale et assez surréelle de Canaletto, la poésie désespérée de Guardi. Prenant les avantages de ces différents éléments de composition, j’ai voulu conjuguer les contraires: parler aujourd’hui un langage d’autrefois et parler hier un langage d’aujourd’hui."
Ludovico De Luigi a, tout au long de sa carrière, noué des relations étroites, souvent à l’origine d’amitiés durables, avec les personnalités les plus diverses, comme Peggy Guggenheim, Federico Fellini, Oscar Niemeyer, Stanley Kubrik, Laurence Olivier, Richard Burton ou encore David Bowie.
Voir le site de l’artiste : Ludovico De Luigi
Ludovico de Luigi, Venise, Editions Ravagnan, 1988.