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On a écouté : In The Silence de Asgeir

Publié le 27 janvier 2014 par Swann

Comment se retrouver dans la panade à l’heure de sortir une chronique d’album ? C’est très simple. Tu écoutes un album pendant quatre mois en te disant qu’il ne vaut pas grand chose, et subitement, t’as une sorte de déclic qui fait que tu dois réécrire en urgence l’article.

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C’est ainsi que j’en arrive aujourd’hui à revoir presque intégralement mon jugement sur In The Silence, d’Ásgeir Trautsi Einarsson, ou Ásgeir pour les intimes. À vos souhaits ! Le garçon est jeune (21 ans, soit deux ans de plus que moi, ce qui est assez … frustrant) et nous vient tout droit du pays des créatures-qui-se-cachent-dans-les-arbres et des groupes chelous, j’ai nommé l’Islande. Et c’est là qu’intervient le «GROS MERCI» à John Grant, qui a participé à la traduction de ses textes en Anglais. Grâce à lui, des milliers de jeunes guitaristes essayant de pécho en mal de reconnaissance vont éviter de peu le yaourt islando-Jonsi pendant toute l’année 2014, et la honte qui va avec.

Parce que oui, cet album, c’est une quasi-certitude, on va en entendre parler pendant quelques temps. C’est qu’il a frappé fort pour son premier essai, le petit. D’abord paru dans sa langue natale en 2012 et très sobrement intitulé Dýrð í dauðaþögn (Gloire Dans le Silence de la Mort), il a connu un énorme engouement qui l’a propulsé en tête des ventes des mois durant en Islande et lui a permis d’y remporter le prix de l’album de l’année. Puis, il a choisi de l’exporter en version anglaise, davantage propice à une plus large audience (oui, Bjork et Sigur Ros sont des exceptions). La preuve, depuis sa sortie digitale sur iTunes (le 28 Octobre dernier), l’album s’est classé dans les charts belges et néerlandais, et s’est hissé à la deuxième place du classement islandais. En France, il commence à se faire un nom, sur la toile et sur certaines stations de radio.

In The Silence, c’est avant tout un album cohérent et moderne, où s’entremêlent  habillement mélodies folk et arrangements électroniques, ce qui tend à le rapprocher des dernières productions de Justin Vernon. Et c’est justement ce qui m’a déçu pendant ces quatre mois d’écoutes. Parce que, thanks to Birdy, il m’est désormais impossible de réécouter quoi que ce soit de Justin Vernon, alors même que c’était l’un de mes demi-dieux. Ásgeir, si on est réducteur, c’est donc la version nordique de Bon Iver. Mais pas tout à fait.

On retrouve ces voix de tête empilées caractéristiques sur la quasi totalité des titres, cette recherche dans les mélodies, cette quête de la mélodie magique qui va droit à ton âme. Les compositions sont directes, accessibles sans être faciles. Les mélodies sont lisibles, naturelles. On sent d’ailleurs que cet album puise son inspiration dans la nature. Les touches de synthés, par ci, par là, évoquent des sons de la nature. Les compositions semblent retranscrire en notes un tableau, une perception.

Cet album est bourré de paradoxes : là où Vernon tendait vers l’expérimental, Ásgeir tend vers le mélange des genres. Il regorge de vraies bonnes chansons folk, modernes dans l’esprit, mais enrobées de cette carapace électronique, elles perdent de leur charme. Et puis, il faut saluer le travail de John Grant pour la traduction, parce que la langue anglaise passe «crème» sur la musique. Si bien que l’on croirait entendre un ersatz de Bon Iver, trop impersonnel, aseptisé, «déjà vu». Mais une chose est sûre : il ne laisse pas indifférent.

Si on ne devait retenir que trois chansons, ce seraient :

  • «King And Cross» : un tube absolu, d’une fraîcheur redoutable. Construit comme un véritable single, les arrangements y sont riches (cuivres, synthés démultipliés, …), et la mélodie reste immédiatement en tête.
  • «Going Home» : LA chanson qui ressort clairement de cet album. La plus sombre, la plus belle, la plus envoutante. Cette tension qui s’installe, évoquant aisément James Blake, titille l’oreille.
  • «Torrent» : le deuxième single de l’album. Une sorte de mix entre Coldplay et Bon Iver qui donne envie de se rouler dans l’herbe fraîche et de gambader au soleil avec une biche. Ouais bon ok, je m’emporte. Mais y’a un petit peu de ça quand même …

Les autres chansons restent davantage dans un registre pop-folk «traditionnel» et complètent l’atmosphère de l’album. Mention spéciale pour le refrain d’«Head In The Snow» et ses bidouillages. Mais toutes laissent un petit morceau de mélodie en tête, ce qui, en soi, est assez fort.

On connait maintenant un peu mieux, grâce à ces musiciens venus du froid, les sons si spécifiques à la langue islandaise. Et on se dit qu’elle colle parfaitement non seulement aux arrangements mais aussi aux mélodies. L’anglais a tendance à uniformiser un peu tout, et un artiste islandais devient la copie conforme de Bon Iver, alors qu’il n’en est (presque) rien.

Mais j’ai toujours ce même regret : elles auraient été sublimes en guitare voix, dépouillées. Le mélange des genres est trop marqué ici et cela m’a empêché de capter les émotions qu’il essaye de délivrer. Rendez-vous dans les salles de concert.

Pour les amateurs de mélodies épurées, c’est par ici. (quelques chansons seulement de l’album en version islandaise)

Pour les aventuriers, c’est par là. (album en version anglaise)

Pour tous, la Toe Rag Session (Acoustique) en téléchargement gratuit.


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