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Concert : récital de Marie-Nicole Lemieux à la Salle Gaveau

Publié le 11 février 2014 par Nicolas Bourry @nicolasjarsky
©  abdallahh - Flickr

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Entre Louis et Marie-Nicole Lemieux c’est une belle d’histoire d’amour musical. La contralto ne peut que vous séduire. Pour commencer, par son talent bien évidemment. Sa voix est extraordinaire. Assurée, sensuelle, puissante. Son timbre est rare et précieux. Ses albums, et ses prestations scéniques d’autant plus, sont autant d’occasions d’être impressionné par cette tessiture hors du commun. Ensuite par sa générosité et sa personnalité. Marie-Nicole Lemieux crie, rit, bouge, jette un regard langoureux à son pianiste, à son public… Chevelure rousse flamboyante, sourires et regards ravageurs, elle est unique dans le paysage classique et lyrique. Chaleureuse et accessible, Marie-Nicole Lemieux prouve que la « diva » peut aussi être quelqu’un de drôle et confirme que les Québécois sont sympathiques par nature.

Ce récital fait le parallèle avec son « anthologie » qui est récemment sortie chez Naïve : La Passion Lemieux qui reprend les airs d’opéras qui ont jalonné sa carrière. Vivaldi bien sûr mais aussi Haendel, Mozart ainsi que Massenet, Saint-Saëns, Berlioz et Offenbach. Éventail de son talent, voyage à travers les époques et les styles, avec de prestigieuses collaborations (Philippe Jaroussky, Fabien Gabel, Karina Gauvin…) Marie-Nicole Lemieux se prête cette fois sur scène au jeu du récital, seule, accompagnée simplement au piano dans le somptueux cadre de la Salle Gaveau.

Bon, on démarre le concert avec un a priori plutôt positif vous l’aurez compris. Verdict ?

Première surprise en ouvrant le programme : très peu d’airs d’opéras mais majoritairement des lieder. Nous tout nous va mais cela se différencie très nettement de l’album entièrement consacré à l’opéra. Marie-Nicole Lemieux fait son entrée sur scène avec une robe près du corps, noir et rouge vif comme sa chevelure. Le concert démarre par un air italien léger de Giordani. Parfait pour commencer. Ensuite la soliste prend la parole et on comprend très vite qu’il ne s’agit pas d’un récital comme les autres. Marie-Nicole Lemieux invente le "café récital" et rythme sa prestation de petites anecdotes sur son parcours, sur ses débuts, sur son rapport à la musique. Le programme est très bien construit et monte en puissance. Le deuxième air de Marcello est déjà plus consistant que le premier et avec Schubert on démarre les choses sérieuses. Couleurs, contrastes, profondeur… Tout y est. "La Truite" traditionnellement cantonné aux rappels est ici en bonne place dans cette première partie du récital et cela nous plaît. Après l’Italie et l’Autriche, on attaque la Russie. "Pourquoi Rachmaninov? Parce que j’ai l’âme russe" lancera-t-elle mutine avant d’entamer deux airs du compositeur russe toujours avec le même talent. Juste avant l’entracte elle est rejoint sur scène par l’altiste Antoine Tamestit pour Brahms. On a moins été séduit par ce moment un peu trop lisse.

Après l’entracte, Bach avec une nouvelle surprise et l’arrivée de Sarah Nemtanu. La magie opère tout de suite. Marie-Nicole Lemieux donne l’impression de prendre son envol, Sarah Nemtanu est saisissante. Après Bach, De Falla pour quatre des Sept chansons populaires espagnoles. On ne sait plus où donner de la tête ! Cette fois Marie-Nicole est énergique et tranchante. Décidément, la chanteuse nous montre sa personnalité vocale aux mille visages. Notre premier coup de cœur du récital : l’air de Kurt Weil, Youkali, tout simplement sublime. Oui, après Bach et De Falla, la soliste s’attaque à Kurt Weill. On a la tête qui tourne, l’ivresse est là. On termine les surprises avec l’arrivée de Gaëlle Arquez pour un extrait des Noces de Figaro. Moment de grâce avec deux sublimes chanteuses aux tessitures complémentaires. Sans transition elles attaquent la Barcarolle d’Offenbach. Forcément notre deuxième coup de cœur. Volute d’élégance et de finesse.

Le concert se termine par plusieurs rappels (Rossini, Hahn et Berlioz). On est bien, on ne veut pas partir. Le public s’enflamme à chaque salut de la chanteuse.

L’ennui est une notion qui n’existe pas chez Marie-Nicole Lemieux. Elle nous surprend à chaque air et passe d’un style et d’une langue à l’autre sans le moindre problème et toujours avec un investissement total. Un air est une oeuvre à part entière, et on voyage avec elle dès les premières notes.

Bravo à Marie-Nicole Lemieux pour son talent et sa générosité qui font de ses récitals, des instants lumineux et uniques.

L’album La Passion Lemieux, on vous en a parlé.



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