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Le reste est silence – Carla Guelfenbein

Par Theoma

 

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« Grandir, c’est comme gravir une montagne avec une grande pancarte autour du cou sur laquelle est écrit : OUBLIE… »

Tommy, douze ans, a une maladie cardiaque qui lui interdit les jeux turbulents des garçons de son âge. Caché sous une table, il s'amuse à enregistrer sur son Mp3 le joyeux verbiage d'un banquet nuptial. Et voilà que l'on parle de sa mère, brutalement disparue dix ans plus tôt. Une brèche s'ouvre dans les secrets si bien gardés de la famille recomposée. La vie que tous croyaient ordonnée et paisible dérape, et les liens se distendent à mesure que l'histoire se tisse. Dans les non-dits de l'autre, chacun cherche sa propre vérité.

Ce qui m'étonne le plus dans l'écriture de Carla Guelfenbein, c'est sa capacité à dire beaucoup avec très peu. Les mots sont des bulles de savon, délicats, sensibles, ils risquent d'éclater avant que le lecteur puisse les lire. L'atmosphère s'installe en douceur pour atteindre une grande profondeur.

Le reste est silence est un magnifique roman. La solitude de l'enfance, les adultes défaillants face aux tourments de l'existence, l'intelligence qui, lentement, tue quand elle est trop précoce, la sensibilité des âmes, l'enfermement causé par la détresse et l'incapacité à demander de l'aide. Le désir de l'autre, l'amour pour un enfant qui n'est pas le sien, la difficulté d'être au monde. Autant de sujets graves abordés avec la plus grande justesse.

Un roman choral qui nous fait vivre la vérité intérieure de chaque personnage. Personne a tort. Tout le monde a raison. Le cycle semble sans fin jusqu'à ce qu'un petit garçon décide de dire stop. Beau, rare, triste. La fin m'a laissée sur le carreau.

Actes Sud, 309 pages, 2013, traduit de l'espagnol par Claude Bleton

Extrait

« Quand peu à peu la passion s’éteint, nous vivons de souvenirs, d’intentions, de loyautés et de sentiments qui possèdent autant sinon plus de valeur que l’ardeur à laquelle ils ont succédé. Il y a encore quelques semaines, comprendre cela me semblait être un signe de maturité, mais aujourd’hui je trouve que c’est une élégante boîte vide. Nous sommes le théâtre d’innombrables processus invisibles, des cellules meurent, d’autres naissent, certaines entreprises s’arrêtent et d’autres démarrent. Et soudain nous avons changé. »

Lu également par Dominique, L'or rouge,...


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