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Antoni Taulé : le théâtre de l’absence

Publié le 02 mai 2014 par Pantalaskas @chapeau_noir

Taulé afficheA la maison Elsa Triolet et Louis Aragon à Saint-Arnoult-en-Yvelines sont présentées actuellement des toiles récentes du peintre Antoni Taulé. Faut-il parler de scène, de mise en scène, de tableau ?  Car c'est bien un vocabulaire emprunté au théâtre que l'on est tenté d'utiliser. La peinture d'Antoni Taulé est un moment d'une démarche plus générale qui inclut peinture, photographie, décor de théâtre, architecture. Si le désir de peinture naît très tôt chez Taulé,  le jeune homme devra pourtant s'orienter vers des études d'architectures. Mais, au bout du compte,  le futur architecte tombera du côté où il penche : la peinture.

Théâtre d'ombre et de lumière

Riche de toutes ces expériences, le peintre traduira dans ses toiles une préoccupation constante : composer une scène habitée par une lumière jaillissant d'une source unique : une porte ou une fenêtre monumentale qui détermine toute l'orientation de cette scénographie. Si bien que peintures, décors  ou photographies participent d'un même élan, d'une même projection  dans un jeu théâtral  aux personnages souvent absents, parfois inattendus, égarés après s'être enfuis des toiles de Picasso, Bacon, Michel-Ange, où encore d'un livre de Raymond Roussel.
Dans les commentaires sur l’œuvre du peintre le terme d'hyperréalisme revient quelques fois. Aimable plaisanterie que de mettre sur le même plan Antoni Taulé avec le mouvement hyperréaliste américain dont la précision photographique de la peinture se situe dans la recherche d'une réalité crue fort éloignée de l'univers du peintre Catalan.
Je ne cache pas ma préférence dans les peintures de Taulé  pour les toiles du milieu des années soixante dix quand le travail du peintre prend ce parti théâtral alors que les personnages sont encore absents de ces espaces. A cette époque, l’œuvre de Taulé accède à ce point de non retour : la mise en place de ce théâtre d' ombre et de lumière dans lequel, avec ou sans personnage, l'intensité et la tension d'une situation théâtrale nous saisit totalement avant même qu'une action ait lieu.

"Laboratoire d’attente" 1977 Antoni Taulé

Moments suspendus

On sait qu' Antoni Taulé s'est impliqué dans le décor de théâtre. Il a réalisé ses premiers décors en 1982 à la Maison de la culture de Grenoble, pour "Les Trois sœurs" d' Anton Tchekhov, pièce  mise en scène par Ariel Garcia Valdès. C'est en travaillant avec ce même metteur en scène qui recevra plus tard un prix pour la scénographie de "La corona d'Espines" à Barcelone. Ce sont des peintures qui sont présentées dans l'exposition de la Maison d'Elsa Triolet et Louis Aragon mais on ne peut pas dissocier cependant dans ce rapport au décor de théâtre le travail photographique de l'artiste.
Cette conjonction entre lumière, scénographie, architecture habite également ces photographies réalisées toujours avec la volonté d'un réalisme épuré, suggérant une réalité qui  peut-être n'existe pas.  La source de lumière, unique, conditionne l'ensemble d'une scène dans laquelle quelques chose s'est passé ou se passera. Ces photographies participent à l'invention de cet univers de moments suspendus, silencieux, dans lesquels peintures, photographies, décors  dessinent les contours d'un théâtre de l' absence.

 Antoni Taulé

Du  1er février au 11 mai 2014
Maison Elsa Triolet-Aragon
Moulin de Villeneuve,
Rue de Villeneuve
78730 St Arnoult-en-Yvelines


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