Bonjour à tous,
L'actualité brûlante m'amène à sauter sur mon clavier, encore choqué par ce que j'ai vu et entendu en rentrant chez moi. Nous exprimons je crois tous la même indignation à l'égard de ces actes odieux et la même compassion pour les victimes et leurs proches. Charlie Hebdo, journal provocateur et satyrique, mais chantre de la liberté d'expression, a encore été frappé. Espérons qu'il pourra s'en relever. Dans ce type d'affaires, les informations arrivent au compte-goutte et rien ne peut être totalement analysé à chaud. Mais on peut tout de même réunir quelques informations et émettre quelques hypothèses sur les causes de ces actes...
Les faits
Vers 11h30, deux ou trois hommes cagoulés et armés d'arme de première catégorie font irruption dans le siège du journal "Charlie Hebdo". Ils ouvrent le feu en plein comité de rédaction, tuant 10 personnes et en blessant 20 autres (le bilan peut encore changer). Le reste des employés se réfugient sur le toit. Ils abattent ensuite deux policiers et prennent la fuite, poursuivi par des policiers, en direction du nord de la capitale. Ils changent ensuite de véhicule aux alentours de la Porte de Pantin (nord-est de Paris) pour un véhicule volé à une personne et percutent également un piéton, puis continuent leur fuite en direction de la Seine-Saint-Denis où les recherchent semblent s'étendre désormais. La première voiture poursuivie est analysée. Les réactions ne se sont pas faites attendre. Inutile de toutes les rappeler, mais François Hollande, pour ne citer que lui, à parlé de "barbarie" et souhaite "l'Union Nationale". La situation est en effet urgente : c'est le plus grave attentat sur le sol français depuis celui de l'OAS en 1961 qui avait provoqué 28 morts. D'autres attentats plus récents (comme celui du RER B en 1995) avaient fait moins de morts mais beaucoup de blessés, comme celui de 1986. C'est donc en toute logique que le plan vigipirate a été relevé au niveau maximal (Alerte Attentat) en Ile-de-France. Les réactions des politiques sont nombreuses, en particulier sur les réseaux sociaux qui sont l'occasion de fixer des manifestations de soutien. Un véritable élan de compassion se met en place, espérons que ces rassemblements seront de la plus grande ampleur possible pour montrer notre détermination et notre unité... Les réactions viennent aussi du monde entier pour condamner ces actes (Etats-Unis, Russie, Royaume-Uni,...).
Les causes d'un tel attentat
Nous en découvrirons petit à petit, et donc on ne peut pour le moment formuler que des hypothèses sur les motivations de ces actes. Pour commencer, il semble de plus en plus certain que les personnes ayant commis ces actes ont invoqué Dieu en criant "Allahu Akbar". Et cette fois-ci, l'ampleur de l'attaque, ses victimes et sa forme ne sont en rien comparable avec les récents événement de Nantes, Dijon ou Joué-lés-Tours, qui semblaient être le fait de déséquilibrés. Les méthodes, l'armement, la préparation, sont le fait de personnes entraînées et beaucoup plus conscients de ce qu'ils font. Il s'agit là de véritable de terroristes qui agissent ici probablement au nom d'un islam fanatique.
Pourquoi Charlie Hebdo ?
Un petit retour en arrière s'impose. Le choix du siège du journal Charlie Hebdo est tout sauf anodin et montre déjà les motivations de cet attentat. En effet, cet hebdomadaire est très connu pour ses unes provocantes à propos de l'actualité politique. Les hommes et femmes politiques, partis et organisations, célébrités, religions, ont tous à un moment ou à un autres, Mais les unes au sujet de l'Islam, et notamment les caricatures de Mahomet ont fait le plus polémique. Dès 2006, après les premières caricatures (reprises d'un journal danois), des menaces ont été proférées à l'égard du journal satyrique. 2011 fut une année plus sombre, marquée par un passage suite à une nouvelle caricature : en effet, un incendie est provoqué le 2 novembre 2011 au siège du journal. D'origine criminelle, l'auteur n'est pas retrouvé. Le site web fut ensuite piraté en 2011 et 2012. Toutes ces polémiques et ces hostilités à l'égard de Charlie Hebdo avaient entraîné la mise en place d'une protection du siège et des auteurs, une protection semble t-il moins resserrée depuis quelques temps. L'inimitié des musulmans intégristes à l'égard de l'ironie de Charlie Hebdo n'était donc plus à démontrer, mais l'attentat de ce jour est d'une autre dimension. Il faut donc évoquer un autre paramètre : le contexte actuel.
Pourquoi un attentat maintenant ?
Il s'agit là de la question la plus polémique et dans l'immédiateté nous ne souhaitons pas jeter de l'huile sur le feu ou récupérer politiquement ces faits graves. Toutefois, la question peut-être posée légitimement, et Charlie Hebdo ironisait même sur cette question la semaine dernière.
Triste dernier dessin pour Charb, une des victimes de la fusillade. Mais en réalité, le contexte était bel est bien tendu. Depuis la participation de la France aux interventions contre l'Etat Islamique, la menace terroriste augmenta et comme nous le rappelions dans notre article bilan de l'année 2014, cela transforma la France en une nouvelle cible du terrorisme islamiste, avec notamment l'exécution barbare et arbitraire du français Hervé Gourdel en Algérie. Depuis, les peurs d'attentats ont trouvé leurs échos dans les attaques pseudo-terroristes de déséquilibrés mentaux. Il est évident que l'attentat ayant touché aujourd'hui la France voit ces peurs confirmées et s'intègre dans une logique de réponse à la politique extérieur de notre Etat concernant l'Etat Islamique. Une remise en cause ou une réorientation va t-elle s'opérer ? L'attaque va t-elle conforter le choix de lutter contre l'Etat Islamique ? La question pourra se poser une fois la plaie refermée...
Faut-il s'inquiéter ?
Bien sûr, le plan vigipirate a été relevé au niveau maximal et a pour but de renforcer la sécurité en vue d'une autre attentat. Car la multiplication des faits de violences et attaques dernièrement reflètent une triste réalité du terrorisme actuel : il est de plus en plus constitué en réseau et dépasse la sécurité des Etats. Le terrorisme utilise à la fois la puissance d'internet pour diffuser son idéologie (principal vecteur de passage à l'acte) et les médias qui diffusent les actes et "donnent des idées" malgré eux. Il n'y a qu'à se souvenir des très récentes attaques en voiture pour s'en rendre compte. S'il paraît difficile de penser qu'une attaque de telle ampleur aura de nouveau lieu très prochainement, il n'est peut-être pas exclu que des attentats ou attaques d'une moins grande ampleur aient lieu contre des français en France ou dans le monde (éventuels otages). Bien évidemment, il faudra tenir compte des événements politiques futurs pour évaluer ce risque. Cette nouvelle attaque devrait aussi relancer le débat au niveau européen ou mondial. En effet, la lutte anti-fondamentaliste est difficile aussi bien dans les pays occidentaux qu'orientaux : il se présente soit comme un réseau informe dans sa version terroriste, soit comme une guérilla très bien articulée et dotée en moyens sur le terrain, ce qui a pu être source d'enlisement en Afghanistan ou en Irak. Nul doute que nos stratégies doivent être renforcées ou revues collectivement, peut-être dans le cadre de l'ONU.
Pour l'heure, nous nous en tiendrons à cela. Nous tenons à rappeler nos plus vives condoléances aux victimes, à leur famille. Vive la liberté d'expression, vive la République, vive la France !
Sources
LibérationFrance InfoLe PointFrance TV infoLe Nouvel Obs
Vin DEX