Présentation de l’éditeur :
Benjamin Wood signe un premier roman magistral sur les frontières entre génie et folie, la manipulation et ses jeux pervers – qui peuvent conduire aux plus extravagantes affabulations, à la démence ou au meurtre.
Cambridge, de nos jours. Au détour d’une allée de l’imposant campus, Oscar est irrésistiblement attiré par la puissance de l’orgue et des chants provenant d’une chapelle. Subjugué malgré lui, Oscar ne peut maîtriser un sentiment d’extase. Premier rouage de l’engrenage. Dans l’assemblée, une jeune femme attire son attention. Iris n’est autre que la sœur de l’organiste virtuose, Eden Bellwether, dont la passion exclusive pour la musique baroque s’accompagne d’étranges conceptions sur son usage hypnotique…
Bientôt intégré au petit groupe qui gravite autour d’Eden et Iris, mais de plus en plus perturbé par ce qui se trame dans la chapelle des Bellwether, Oscar en appelle à Herbert Crest, spécialiste incontesté des troubles de la personnalité. De manière inexorable, le célèbre professeur et l’étudiant manipulateur vont s’affronter dans une partie d’échecs en forme de duel, où chaque pièce avancée met en jeu l’équilibre mental de l’un et l’espérance de survie de l’autre.
L’auteur du Complexe d’Eden Bellwether manifeste un don de conteur machiavélique qui suspend longtemps en nous tout jugement au bénéfice d’une intrigue à rebonds tenue de main de maître.
Bon. J’ai été scotchée par ce roman, dont j’ai essayé de retarder un peu la fin pour ne pas m’en séparer trop vite, mais c’était impossible. De toute façon, la première page nous brosse déjà le tableau de la fin, donc on n’a qu’une envie : savoir comment on en est arrivé là (j’ai même échafaudé une hypothèse qui s’expliquait par le côté hyper-manipulateur d’Eden, mais elle n’avait aucune valeur), guetter chaque coin de page avec de plus en plus d’inquiétude et d’impatience.
Il n’y a donc qu’à se laisser mener par Benjamin Wood, qui signe avec brio ce premier roman : c’est brillant, intelligent, attrayant, touchant aussi. Car si l’auteur connaît son sujet à fond et peut se glisser dans différents points de vue, sauf celui d’Eden, toujours objet d’observation, de conjectures et de craintes, il nous entraîne surtout dans les pensées, les rêves, les désirs d’Oscar, ce jeune aide-soignant si attachant, si désireux de bien faire. Un jeune homme athée qui a eu un jour cette idée folle d’entrer dans la chapelle de King’s College, attiré par une musique fantastique… et qui va se trouver en quelque sorte à la croisée de deux mondes : les étudiants et les travailleurs, les gens très riches et très protégés et ceux qui se lèvent tôt pour travailler durement, les gens normaux et les personnalités toxiques. Cette rencontre avec Iris et Eden Bellwether, la découverte de la personnalité pour le moins excentrique de ce dernier, l’intrigue qui va en découler, c’est le coeur du roman, et Benjamin Wood maîtrise à merveille l’art de mener un récit, de faire apparaître et disparaître les personnages au bon moment, de créer les rebondissements nécessaires, de dessiner une atmosphère pour nous tenir en haleine jusqu’au dénouement fatal, on le sait dès le début.
Mais à bien y réfléchir, il y a plusieurs niveaux de lecture dans ce roman très intelligent (je me répète) : le thème psychologique et psychiatrique, le roman étudiant, dont la ville de Cambridge est un personnage, avec ses colleges, la rivière Cam, le célèbre choeur de King’s, qui ouvre évidemment sur le thème de la musique et de l’orgue (je n’ai qu’une envie, c’est d’y aller en vrai, même si le roman m’y a transportée de façon très efficace !). Il y a aussi, me semble-t-il, le thème de la figure paternelle, à travers les pères d’Eden et d’Oscar mais aussi à travers le Dr Paulsen, sorte de figure de substitution pour Oscar. Le thème du double, sous différentes facettes plus ou moins évidentes : le frère et la soeur, deux profs d’université, qui servent d’écrin à la confrontation entre Eden et Oscar, les deux héros masculins.
Enfin, un autre plaisir, et non des moindres, de ce roman est la puissance évocatrice de l’écriture de Benjamin Wood : j’avais l’impression de voir la glycine sur le mur de Cedarbrook, de respirer l’odeur du petrichor (la terre après la pluie), de sentir l’ombre des chapelles, de fouler l’herbe au bord de la Cam, de ressentir la sauvagerie de la musique jouée par Eden, et bien d’autres sensations. Le style de l’auteur est très visuel, il a quelque chose de cinématographique, sans compter son sens du rythme. Allié à cette si bonne histoire, à ce personnage fascinant qu’est Eden Bellwether et à celui si attachant qu’est Oscar, il m’a vraiment fait passer un très bon moment, de ceux qui me font ressentir pourquoi j’aime lire.
J’ai lu ce roman dans les tout derniers jours de 2014 : autant dire que j’ai fini l’année en beauté !! Merci, Cachou !
Benjamin WOOD, Le Complexe d’Eden Bellwether, traduit de l’anglais par Renaud Morin, Editions Zulma, 2014
Avec ce titre, j’ai atteint le 1 % de la Rentrée littéraire 2014 et je vais arrêter là ce challenge : même si je lis encore des romans de la dernière rentrée, j’ai surtout la volonté de limiter les challenges à l’extrême. De ême, ce sera sans doute le dernier titre pour le God save the livre, qui se termine bientôt, en février.
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