Au cinéma : «Frank»

Après trois longs-métrages, Lenny Abrahamson nous livre sa quatrième réalisation : « Frank ». Il s’agit de l’adaptation d’une histoire vraie, adaptée des mémoires de Jon Ronson, qui signe également le scénario du long-métrage avec l’aide de Peter Straughan. Michael Fassbender, Domhnall Gleeson et Maggie Gyllenhaal tiennent les rôles principaux. « Frank » sort dans nos salles le 4 février 2015.

Synopsis : Jeune musicien rêvant d’être une rock star, Jon croise le chemin d’un groupe de pop avant-gardiste à la recherche d’un nouveau clavier. Il devient vite le protégé de Frank, leur leader, aussi fascinant que mystérieux : ce génie musical vit dissimulé en permanence sous une grande tête en papier mâché.

« Frank » est un long-métrage au charme exceptionnel. Dès les premières minutes, on découvre le personnage principal, interprété par Domhnall Gleeson, cherchant l’inspiration musicale autour de lui. En quelques secondes seulement, un léger sourire est présent chez le spectateur, en plus d’une forte sympathie pour ce personnage. En effet, le scénario va énormément jouer sur la sympathique marginalité des protagonistes afin de capter l’attention du spectateur. Au fur et à mesure que le long-métrage avance dans sa durée, une poésie toute particulière s’installe. Celle qui n’est pas accessible à tous de manière innée, celle que l’on n’a pas besoin de comprendre pour pouvoir la ressentir. Dans cette folie musicale, un brin dévastatrice, le scénario se permet d’aborder les déboires des maladies mentales et la schizophrénie. Il est dommage que ces sujets n’aient pas un traitement plus poussé et ne soient qu’effleurés. « Frank » n’en reste pas moins un joli long-métrage à la fois fou et poétique.

Dans le rôle principal, on retrouve Domhnall Gleeson, que l’on avait remarqué dans « Il était temps » de Richard Curtis. Au milieu de tous les autres personnages, il est celui qui permet au spectateur d’entrer dans cette bulle sauvage et de s’identifier à lui. Une nouvelle fois, l’acteur nous prouve tout son talent, en amenant plus de finesse à son personnage qu’il n’y paraît. À ses côtés, Maggie Gyllenhaal explose à l’écran grâce à des scènes très fortes où son talent d’actrice peut s’exprimer sans barrières. On (re)découvre la puissance du jeu d’acteur de Scoot McNairy, valeur montante d’Hollywood, tandis que l’acteur français François Civil apporte une touche d’exotisme non-négligeable. Cependant, la véritable star du casting est Michael Fassbender, interprète de Frank, où, sans faciès, il réussi l’exploit de créer un personnage aussi touchant qu’inquiétant. Mieux, il amène un personnage aux multiples identités, entre simple humain et légende urbaine.

La réalisation de Lenny Abrahamson ne cherche jamais la technique. Les plans sont très simples dans leurs mouvements. Cependant, le réalisateur livre une véritable recherche picturale où chaque cadre est mis en scène à la manière d’un tableau. Il y d’ailleurs ce plan où les personnages, formant le groupe de musique, se trouvent disposés derrière une table à la manière de « La Cène » de Leonard De Vinci, écoutant l’enregistrement de leur album. La direction photographique de James Mather possède ce petit quelque chose indescriptible, offrant au long-métrage un charme d’un autre temps et sublimant les choix de cadres de Lenny Abrahamson. La composition musicale de Stephen Rennicks clôt ce processus artistique avec un son underground et si particulier, qui colle parfaitement aux intentions du scénario : narrer l’histoire étrange de ce groupe, qui se complaît dans leur musique créée avant tout pour eux-mêmes, plutôt que pour plaire à une masse.

« Frank » est un long-métrage singulier où la notion d’identité n’est malheureusement pas suffisamment traitée. Il n’en reste pas moins une aventure intéressante dans les méandres d’un groupe musical étrange où les acteurs brillent de talents.

Frank. De Lenny Abrahamson. Avec Domhnall Gleeson, Michael Fassbender, Maggie Gyllenhaal, Scoot McNairy, François Civil, Carla Azar, …

Sortie le 4 février 2015.