Le flou artistique en photographie: une technique propre à David Hamilton

En tombant sur un article dans un magazine sur le célèbre photographe, j’ai eu envie de me pencher sur son travail et plus particulièrement sur le flou artistique, qui lui valut sa renommée. Parfois décrié pour son choix de modèles, mais toujours adulé pour son instinct remarquable, David Hamilton est aujourd’hui un des photographes les plus illustres du XXe siècle. Actuellement et ce jusqu’au 14 juin prochain, une rétrospective de son art est proposée à la Galerie des Nouvelles Images de l’Hôtel Scribe à Paris. Qui est cet artiste de 82 ans aux clichés inimitables ?

© David Hamilton

Né en Angleterre en 1933, il vit entre Montparnasse et Ramatuelle depuis de nombreuses années. Après des études d’architecture – sans obtention d’un diplôme – il se tourne vers la photographie en devenant directeur artistique pour plusieurs magazines, notamment Elle et Queen Magazine. Déclinant les commandes commerciales, il préfère se pencher sur son propre travail et réaliser des livres – une quarantaine – ainsi que des films ; seul Nina Ricci a eu le privilège d’obtenir  régulièrement de lui une photographie pour sa campagne de parfums. Réputé essentiellement pour ses nus féminins, il prend également en photo des nature-mortes, des paysages, des portraits… Il puise son inspiration dans la nature, dans tout ce qui évoque la fragilité et l’innocence du monde. Jugées bien trop jeunes, ses modèles proviennent des pays nordiques, de l’Allemagne, de Suède ou de Hollande, découvertes au gré de ses déambulations sur les plages nudistes du Sud de la France par exemple. Pour ses prises de vues, il est à la recherche d’un physique singulier et précis : des silhouettes aux formes longilignes et gracieuses, de préférence blondes, sortant tout juste de l’enfance et n’offrant aucun sourire à l’objectif, car pour lui « le sourire, c’est bon pour les photos de vacances ». David Hamilton s’insurge de l’image scandaleuse qu’il véhicule depuis plusieurs années, car à l’apogée de son art les mœurs étaient bien différentes. La libération du corps ne choquait personne dans les années 1970 et ne provoquait aucune censure. Pour lui, il n’y a rien de déplacé dans ses clichés, « rien à voir avec la vulgarité de notre époque actuelle ». Malheureusement le monde a changé et le regard que nous portons sur ses nus ne peut être le même qu’il y a quarante ans. À l’image de ses clichés, n’est-il pas figé dans une sorte de nostalgie de sa carrière, à l’époque de sa gloire ?

© David Hamilton

« Je ne suis pas un visage, je suis un nom », déclare-t-il. En effet, l’homme est peu reconnu contrairement à ses photographies au style unique. Le flou artistique est sa signature, il en fait son credo. Niant farouchement l’utilisation de bas résille ou de vaseline sur l’objectif, David Hamilton laisse planer le mystère quant à sa technique, rendant ses photographies si particulière. D’ailleurs il tient à préciser qu’il n’est « qu’un amateur, incompétent en matière technique mais à l’œil aiguisé ». Oui c’est assez surprenant, mais finalement c’est ce qui fait toute la superbe de ces clichés. Un instant figé dans un moment spontané sans fioriture, sans retouche, rien que la beauté naturelle qu’offre le monde. Captant la lumière de l’aube ou du crépuscule, il réalise ses œuvres en leur donnant une charge romantique et nostalgique, accentuée par des teintes pastelles. Proche d’une esthétique picturale, la faible lumière permet de noyer les détails et de fondre les éléments les uns dans les autres. Une impression de douceurs et de mouvement s’en dégage ; les corps se meuvent de façon très spontanée et les bouquets de fleurs fanent à travers l’objectif telles des vanités. Le flou artistique est sans conteste lié à la notion d’atmosphère. À la fois léger et trouble, cet effet vaporeux oscille entre étrangeté et onirisme exacerbé.

Certes, sa notoriété a été ternie, malgré cela il reste une figure majeure de la photographie. Certaines de ses prises de vue sont à la limite du tabou, toute fois il est loin d’être un artiste oublié. Toujours plonger dans son travail – la publication de nouveaux ouvrages – il envisage de léguer ses œuvres à une fondation, un projet permettant de laisser une trace et d’affermir sa place dans l’histoire de la photographie.

Caroline.