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Lomepal, à l’aube du couronnement

Publié le 26 juin 2015 par Unionstreet
Lomepal, à l’aube du couronnementLe 10 juin dernier nous avons pu rencontrer Lomepal à l'occasion de son concert à la Maroquinerie. C'est sur place, à la terrasse du bar que nous retrouvons l'artiste pour une entrevue calme et posée à quelques heures de sa montée sur scène. Ce concert marquait une étape, une date importante pour le rappeur puisqu'il jouait à domicile à Paris avec un nouveau set et beaucoup de surprises. US : Pour ceux qui ne te connaissent pas encore, peux-tu te présenter brièvement ?

Lomepal : Je m'appelle Antoine, je fais du rap depuis 5, 6 ans et j'utilise le nom de Lomepal. J'habite à Paris donc je fais plus ou moins partie de la scène parisienne. J'ai sorti 3 cds dans les bacs en solo.

Le premier s'appelle " Cette Foutue Perle " sortie en 2013, suivi par " Seigneur " en 2014 et " Majesté " qui vient de sortir et qui est la suite de " Seigneur ", c'est un diptyque du coup.

US : Comment es-tu arrivé dans le rap ?

L : Comme la plupart des gens je pense, il y a du rap autour de toi, ça te tentes, t'essayes, tu écris quelques rimes dans ta chambre et puis à un moment tu as envie de les montrer et, si tu t'acharnes un peu, tu commences à être fier de ce que tu fais.

US : Tu as cet aspect assez difficile à classer. On sait que tu viens de Paris 13 mais ce n'est pas quelque chose que tu mets en avant, que tu revendiques.

L : Non je ne revendique rien, je ne revendique pas mon quartier.

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US : Et c'est important pour toi de ne pas être affilié à un courant de MC's, à un quartier, à une ville ?

L : Oui, c'est important pour moi, je ne juge pas les gens qui le font et j'aime bien les gens qui le font selon comment c'est fait.

Mais moi je n'en vois pas l'utilité dans ma démarche artistique, ça n'aurait aucun sens. Même le fait de me définir comme rappeur c'est quelque chose que je vais petit à petit effacer.

J'ai juste envie d'être un artiste tu vois, de faire mes trucs à ma manière, j'ai pas besoin de représenter une scène ou quoique ce soit.

US : Plutôt le côté liberté...

L : Ouai, c'est ça, j'ai pas envie d'être enchaîné à quelque chose.

US : Du coup comment envisages-tu la musique ? Est-ce que c'est plutôt un exutoire, un exercice de libération ? Ou c'est juste passionnel ?

L : Il y a un côté exutoire et un côté passionnel, c'est les deux en fait. Tu vois ça dépend, parfois tu écris des trucs que tu as sur le cœur, dès fois des trucs que tu n'as pas sur le cœur mais ça te fait du bien de te plonger dans une passion.

De même manière que ça peut te faire du bien de faire de l'escalade si t'aimes ça. C'est pas forcément un exutoire l'escalade mais ça peut te permettre d'oublier tes soucis. C'est un peu la même chose.

US : Tu entames une nouvelle tournée, j'imagine que tu es plutôt excité de rencontrer le public...

L : Ouai carrément, ça va être cool !

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US : Et de manière générale comment appréhendes-tu la scène ?

L : En fait, je travaille beaucoup sur les jeux scéniques tu vois. J'essai d'effacer toutes les transitions simples. J'ai vraiment envie de faire des trucs où on ne voit pas vraiment les transitions, où l'on passe d'un morceau à un autre sans que tu t'en rendes compte, avec une interlude au milieu par exemple.

J'aime ce côté spectacle plus que playlist. C'est comme ça que je vois la scène et comme ça que j'ai envie de m'améliorer. J'aimerais aussi prendre des cours de chant, de respiration, pour mieux gérer ça.

US : En parlant de scène, tu partages ce soir l'affiche avec Caballero. On vous a souvent vu collaborer... Comment ce sont faites ces connexions avec la Belgique, Caba et même Jean Jass ?

L : Ça a commencé avec Caba, c'est lui qui m'a présenté toute la famille là-bas. Caba je l'ai rencontré par Facebook il y a 3-4 ans, 4-5 même... on s'est envoyés un big-up réciproque et puis voilà.

J'avais encore jamais connu ce truc de bosser en groupe, de travailler avec quelqu'un pour faire de la musique. J'avais l'habitude de rapper tout seul tout le temps et ça m'a plu de faire un projet avec quelqu'un et suite à ça on est resté connecter tout le temps.

US : La connexion s'est faite...

L : Ouai c'est ça et on est devenu très bon ami aussi.

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US : Avec cette tournée, tu vas par ailleurs présenter ton nouvel EP " Majesté ". Quels sont les retours que tu as jusque-là ?

L : J'ai des très bons retours. Il est moins difficile d'accès que le précédent d'après ce que je comprends, c'est ce que les gens disent et j'espère que ça va continuer comme ça.

US : Ta musique a pas mal évolué depuis tes débuts. Les derniers EP semblent différents au niveau des sonorités, un peu plus détaché du boom-bap, d'un style de rap plus classique.

L : Ouais j'essai. D'abord parce que je n'écoute pas que du boom-bap et ensuite... ça fait peut-être un peu stupide de dire ça, mais avec le boom-bap j'ai l'impression qu'il y a tellement de choses bien qui ont été faites que c'est difficile d'aller au dessus de tout ce qu'on a comme répertoire et discothèque, de tout ce qu'il s'est fait entre les années 90 et maintenant.

Il y a eu tellement de bonnes choses, que du coup même si ça m'intéresse d'en faire j'ai surtout envie d'expérimenter d'autres choses tu vois.

US : Plutôt mettre ta pierre à l'édifice...

L : Oui c'est ça, j'ai envie d'amener mon truc. Si c'est pour faire ce que d'autres mecs ont fait parfaitement... je pourrais le faire aussi bien peut-être mais ça ne serait pas aussi jouissif que de réussir à inventer mon propre truc.

US : D'ailleurs, dans une interview tu disais que tu voulais sortir de cet aspect freestyle. Alors est-ce que ce nouveau type d'instrus te permet de t'exprimer artistiquement un peu plus, d'aller plus loin ?

L : Là c'était un premier pas, mais je pense et j'espère aller plus loin quand je ferais un album. J'espère vraiment trouver des trucs très différents de ce qu'on a pu entendre.

US : D'autres sonorités...

L : D'autres sonorités, d'autres courants musicaux. Tu sais je pense que le rap ça peut se marier avec tout et n'importe quoi. Tu peux rapper sur du rock, de l'electro, sur de la folk, tout ce que tu veux (rires).

Tu peux toujours rapper, c'est du emceeing, t'ambiances un morceau, c'est ça du rap. Donc il y a peut-être moyen de faire des combinaisons inédites... faut voir ce qu'y peut se faire.

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US : Et jouer avec des musiciens, c'est quelque chose que tu as déjà essayé ?

L : J'ai déjà eu l'expérience de faire ça un soir ou deux avec des potes qui ont des groupes mais sinon mais j'ai jamais pensé à le faire moi-même et ce n'est pas un truc qui m'exciterait dans le moment présent mais peut-être lus tard.

US : Tu parles donc de mixer les sonorités, de partir sur du rock, sur pleins de choses différentes. Si tu devais citer ce qui t'as influencé notamment pour les sons des derniers EP...

L : C'est compliqué comme ça, c'est difficile pour moi de te trouver des exemples comme ça. J'ai des influences de partout tu vois... des trucs de funk, des trucs comme Joe Tex, George Baker. Des choses qui n'ont rien à voir au final, juste des trucs que j'aime bien écouter.

Après, quand j'étais jeune j'aimais bien, et je me suis repris ça récemment, les premiers sons des Arctic Monkeys ou des Strokes. Ou sinon dans la scène électro, il y a des choses que j'aime bien... j'aime beaucoup James Blake par exemple.

En fait c'est difficile de te dire, il y a tellement de choses que j'ai oublié et je n'ai pas de limite, n'importe quel style peut me parler. Mais j'essaie de m'ouvrir en tout cas.

US : Côté production on a remarqué que tu étais plutôt fidèle à tes producteurs, tu as beaucoup bossé avec Jean Jass, Meyso et Hologram Lo, plus récemment avec Stwo. Comment travailles-tu ces collaborations ?

L : Comme la plupart des gens, il n'y a pas de secret, on écoute des tonnes de sons et si on trouve quelque chose qui inspire on demande au beatmaker de nous l'envoyer, on le prend dans ses écouteurs et on l'écoute tout seul.

On cherche l'inspiration, on cherche des idées, on écrit des trucs et on essaie de voir si ça colle. Ensuite on enregistre, on fait des variations, on tente de faire des arrangements sonores pour donner plus de partie, plus de bridge... c'est la manière la plus simple de travailler je pense.

C'est un ping-pong. Tu reçois la prod, tu vois ce que tu peux faire, il voit ce qu'il peut faire et à force on obtient un morceau.

US : De ce principe, j'en déduis que tu écris sur les prod uniquement ? Ou tu adaptes tes textes ?

L : Non non, j'écris quasiment que sur les prods. Je ne peux plus supporter de rapper des textes qui ont été conçus sur d'autres prods, j'ai vraiment besoin de m'adapter. Je l'ai fait par le passé mais ça m'ennuie maintenant.

US : En début d'interview, tu nous a énoncé le terme " diptyque " en parlant de " Seigneur " et " Majesté " sur lesquels on sent de réelles similarités. C'était vraiment planifier de faire ce diptyque ou ça s'est fait au fur et à mesure ?

L : Ouai à la base, il y avait un long projet. On en discutait avec Hologram Lo car il m'aidait pas mal à trouver une suite logique mais c'était trop long pour sortir un projet aussi long donc on a décidé de le diviser en deux.

C'est comme ça que je me suis rendu compte que j'avais des morceaux sombres et d'autres moins. Après j'ai décidé de jouer la carte à fond avec un projet sombre et un projet plus ambiancé, plus joyeux si on veut.

US : Donc dès le début tu avais en tête un projet sur le long terme.

L : Exactement et j'ai travaillé ça sur 1 an et demi.

US : Donc ça explique qu'à l'écoute, j'ai eu le sentiment que " Seigneur " était peut-être plus personnel alors que " Majesté " semblait plus égotripé.

L : Ouais ouais ça c'est sur.

US : Et c'est une évolution ?

L : Non ça n'est pas une évolution. ça n'est pas " Seigneur " puis " Majesté ". C'est les deux à la fois tu vois.

" Seigneur " comme tu dis c'est un projet plus introspectif et personnel avec des choses qui me concernent vraiment moi, avec un côté un peu exutoire comme tu disais.

Alors que " Majesté " c'est tout ce que la musique me permet de faire : m'inventer la vie dont j'ai envie, me permettre de filer dans les étoiles, de raconter tout et n'importe quoi et de me laisser emporter par la musique. C'est de la musique avant tout, sans ce côté ou je me raccroche à Antoine.

US : J'ai l'impressionTes vidéos sont de plus en plus travaillées, notamment dans le travail réalisé avec L'Ordre Collectif. C'est important ce travail fait sur les visuels?

L : Ouai exactement, et ça m'intéresse beaucoup. En plus, en France il y a peu de clips qui sortent du lot je trouve. Donc j'essaie vraiment d'avoir cette démarche et mettre la vidéo en avant.

Il y a des gens qui s'en foutent et qui veulent juste donner du style. C'est moins mon truc de créer une ambiance avec plein de gens derrière. Il y en a qui font ça très bien. Moi je préfère les choses un peu plus farfelues.

US : Plus créatifs et inspirés...

L : Oui j'aime bien me prendre la tête, qu'on se dise que j'ai cherché les trucs les plus fous. Et si je sors un quelque chose dont je ne suis pas fier au moins je sais que j'ai essayé. (rire)

US : D'ailleurs, il y a trois clips qui m'ont marqué : " Enter The Void ", " La Marelle " et " Solo ", avec un aspect storytelling très fort, proche du film...

L : Sur ceux là, c'est L'Ordre Collectif, on travaille ensemble mais c'est sur ces vidéos que je leur ai laissé le plus de place. On a essayé d'amener tout un univers.

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US : C'est toi qui scénarise ?

L : Ça dépend, sur " La Marelle " c'est moi. Sur " Enter The Void " c'est moi... enfin l'idée de base. Après c'est eux qui habillent et qui donnent pleins d'idées. Mes idées sans eux seraient nulles, moi j'apporte les concepts de base. Par contre " Solo " c'est complètement Adrien, j'ai apporté quelques idées mais c'est lui qui a tout écrit.

US : Pour terminer je vais reprendre une phase du titre éponyme de " Majesté ", tu dis je te cite :" Lomepal a les dents longues, vous devez prendre ces paramètres en compte, j'ai perdu trop de temps à taffer dans l'ombre ". Donc on doit s'attendre à quoi pour la suite ?

L : A l'explosion tout simplement.

US : Tu prépares un album ?

L : Oui là je le dis, je suis encore au tout début mais ce sera ça la suite je pense.

US : Donc plus d'EP ?

L : Non j'ai fait suffisamment d'EP, il faut que je fasse quelque chose de plus sérieux. Mais pas tout de suite, sur le long terme, j'ai envie d'amener un truc fou. Après toutes ces choses où je me prends la tête sur du détail je ne peux pas me permettre de faire un album à la va-vite. Ça n'aurait aucun sens.

US : Tu es toujours en indépendant ?

L : Totalement j'ai juste signé avec Caramba Spectacle qui me permet de tourner et de jouer comme ce soir et de tourner.

Propos recueillis par Charles Delestre et David Dupoirieux

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