Slum Village « YES » @@@@½
Sagittarius Laisser un commentaireSlum Village est un groupe survivant. Il n’a succombé ni aux départs (Elzhi en 2010) et/ou à la mort de deux de ses membres fondateurs, Baatin en 2009 (qui venait tout juste de réintégrer la formation pour Villa Manifesto) ni celle plus importante de James Yancey, alias Jay Dee a/k/a J Dilla, un des producteurs hip-hop les plus influent de son vivant. Villa aurait eu 40 ans cette année.
Si le groupe a pu surmonter toutes ces épreuves, c’est parce que Slum Village peut compter sur un pilier, T3, et une famille qui s’est petit à petit agrandie avec Young RJ notamment et des membres « non-permanents » ou occasionnels comme Illa J (le jeune frère de Dilla), Frank Nitt, Black Milk. Bien sûr la patronne Ma Dukes, j’ai nommé Maureen Yancey, gardienne des bien de son fils disparu, veille au grain. Slum Village a failli s’arrêter après Villa Manifesto en 2010, il finit par renaître en 2013 avec la baffe Evolution. Cette année on fait tous un grand YES! parce que devenez quoi…
Je ne sais pas par quel miracle cela a pu se produire mais on est bien en présence de vrais beats inédits de J Dilla, huit au total sans compter l’intro. Pas de « donut » ou d’instrus recyclés comme c’était le cas sur Villa Manifesto (« Lock It Down » était en fait repris d’un album de Wajeed des Platinum Pied Pipers) ou sur d’autres albums, ni de boucles archivées dans ses dernières années avant d’être récupérées dans leur jus sur ses albums posthumes (Jay Stay Paid et Rebirth of Detroit). Pour la première fois depuis Yancey Boys, le premier album d’Illa J qui bénéficiait de beats posthumes « en très bon état » (et Sunset Blvd dans une moindre mesure), là on est presque face à un reboot des Slum Village comme si rien n’avait vraiment changé après Fan-Tas-Tic vol. 2, d’autant plus qu’on a droit à des couplets posthumes de Baatin. Oui ça paraît dingue dit comme ça. Qui l’eût cru que de tels trésors étaient enfouis?
Pourtant c’est bien ce qu’il se passe dès « Love Is » avec le chanteur nusoul Bilal (décidément partout) et Illa J, et les gimmicks habituels de SV qui reprennent le refrain culte de « Fantastic« . Le morceau suivant « Tear It Down » est plutôt du genre bombe à fragmentation avec un impressionnant passage de Jon Connor (recrue signée chez Aftermath) et le single « Expressive » avec sa basse funky s’accorde idéalement avec la voix de BJ The Chicago Kid. Pas une fois on tombe sur un instrumental reconstruit par la magie des studios, on reste scotché par le beat victorieux de « Windows« , avec un immense couplet de J. Ivy, le vibrant hommage des De La Soul à J Dilla sur « Right Back« , ou encore l’authentique ambiance soulful de « Too Much« , où la voix de Baatin est (était…) magique.. Il y a peut-être juste « Yes Yes Remix » qui trahit un assemblage reprit d’un extrait audio de pas très bonne qualité d’une session de J Dilla avec Funkmaster Flex.
On se croirait vraiment entendre un pseudo-volume 3 de Fantastic, de revenir quinze ans en arrière comme si c’était hier. La philosophie du groupe, à savoir rapper pour faire la nique et pour draguer, est intacte. On est content de voir aussi que Phife Dawg est de la partie (les Tribe Called Quest ont été déterminants dans l’émergence du mouvement Native Tongues dont dérive les Slum Village) et celle de Black Milk sur « We On The Go!!« , celui que l’on désigne aujourd’hui comme celui qui a repris le flambeau de J Dilla sur la scène hip-hop de Detroit. Après une dizaine d’écoutes, je n’en crois toujours pas mes oreilles. Et que dire du superbe « Where We Come From« . C’est à se demander si YES n’est pas un semi-album posthume. Les fans de la première heure (donc tous) seront aux anges.