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Primeurs 2015 à Bordeaux (1)

Par Mauss

Nous voilà donc à la veille de la semaine des dégustations "primeurs" à Bordeaux. Tout le monde est ± d'accord que Bordeaux tient là un plus que beau millésime où il y aura, comme d'habitude, des crus qui deviendront légendaires et d'autres qui auront du mal à être au niveau des excellents 2009 et 2010.

Mais il y a une grosse différence avec l'état des marchés tels qu'ils étaient en 2009 et 2015, avec l'enthousiasme des chinois qui n'est plus d'actualité, et les incertitudes économiques du moment, sans oublier les stocks impressionnants qu'il va falloir bien mettre en vente un de ces jours.

Comme d'habitude, certains noms de la presse du vin ont déjà rédigé leur rapport.

On lira avec profit (c'est en anglais) l'article de Bloomberg citant Elin McCoy : ICI

Si le fait que Cheval Blanc, particulièrement heureux de la qualité de ses raisins n'aura même pas de quoi produire le Petit Cheval, si certains crus vont déclencher des commentaires dithyrambiques,  personne n'oubliera le point de vue de Patrick Bernard, fondateur de MILLESIMA (maintenant sous la direction de son fiston) et que je cite ici en anglais :

"Last week, at the Bordeaux cellars of negociant Millesima, about 50 Bordeaux winemakers were present for a massive tasting of the 2014s. Company founder Patrick Bernard cautioned that they’d better be very careful about pricing the 2015s. “If not,” he said, “Bordeaux is dead.”

Et les lecteurs consciencieux de l'article d'Elin McCoy remarqueront cette note sous la photo d'un Lafite-Rothschild :

"Current prices of first growth Château Lafite Rothschild in vintages 2009 through 2014 are lower than their release prices."

Tout cela naturellement mérite des analyses plus pointues, tant il est vrai, par exemple, qu'en AOC Pomerol ou St-Emilion, les crus de référence ont si peu de bouteilles à vendre alors qu'en rive gauche, les amateurs savent bien qu'à la sortie des vins d'ici deux ans, le marché ne manquera point des grands noms de cette rive gauche.

Bref : si des crus comme Ausone, Lafleur, Le Pin, L'Eglise-Clinet, Petrus, La Violette, La Mondotte ont toutes les chances de partir à vitesse Grand V, si Latour continue à ne rien mettre immédiatement sur les marchés, gageons qu'il n'y aura pas trop de problèmes pour trouver des Mouton, des Margaux, des Palmer et autres beautés qui seront mises en valeur dans les commentaires à venir des principaux dégustateurs professionnels.

Que la Chine calme ses ardeurs du début de la décennie, finalement, c'est sain. Que les fonds anglo-saxons, déjà bien chargés, limitent également leurs achats massifs de spéculation, cela devrait ramener le vin à son réel but final : rester un produit de consommation.

Et surtout, comme le dit si bien Jean-Luc Thunevin sur son blog : cette année, on aura une pléthore de crus qui sont toujours restés à des prix acceptables, méritant largement d'être encavés par les amateurs. ICI

Devant ces incertitudes sur la réception que feront à ce millésime les grands acheteurs, dont la GD en France et les USA où le $ a repris des vitamines, on peut prévoir que certains châteaux ne mettront en vente que la quantité minimale à la bonne tenue de leur trésorerie et sauront garder pour de meilleurs moments une quantité intéressante de belles bouteilles qui prendront de la valeur, surtout si l'on oublie jamais que de futurs millésimes peuvent ne pas offrir ainsi des vins de légende.

Enfin, gageons aussi que Bordeaux a enfin compris qu'il n'est plus le nom solitaire similaire à "grand vin" et que depuis quelques décennies, d'autres régions européennes et même mondiales, ont réussi à se créer un noyau dur d'amateurs fidèles auprès desquels ce nom de Bordeaux n'a plus la magie qu'il avait dans les années 80 et 90.

Bref : espérons de tout coeur que Bordeaux va enfin devenir sage et récupérer une cote d'amour faisant quand même sérieusement défaut depuis quelques années.

On le souhaite ardemment pour que des crus comme Haut-Carles, Fleur Cardinale, Rollan de By, Grands Chênes et autres Reignac ayant fait leurs preuves aux sessions du GJE soient enfin considérés avec sérieux par les amateurs ne donnant plus une priorité aux étiquettes et donnant priorité aux bons, aux excellents Rapport Qualité Prix (RQP).


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