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Beau futur à ce marronnier : journalistes du vin versus bloggeurs

Par Mauss

Sur le blog des 5, Hervé Lalau revient (ICI) sur un sujet récurrent : la communication du vin via les activités des journalistes professionnels et celles des bloggeurs, par définition "amateurs" sans oublier les forums où on trouve de tout.

Avant même d'approfondir autant que faire se peut ce sujet, il est bon de rappeler quelques vérités de base structurant ce secteur économique du vin.

POUR LE PRODUCTEUR

Le but de toute communication, en dehors de louanges excessives partant vite aux oubliettes, c'est de commenter avant tout les vins qu'il produit, leurs qualités propres, leurs qualités comparatives aux autres domaines de même appellation et, le cas échéant, leur position sur le marché global du vin. Le but est donc clairement économique : dans quelle mesure cette communication extérieure à la propriété peut soutenir ses ventes.

Dans cette perspective, le domaine va citer sur son propre site les bonnes notes qu'il obtient ici ou là. C'est évident en ce moment où l'on voit les sociétés proposant des vins "primeurs" citer systématiquement les notes des uns et des autres pour assoir leurs ventes.

POUR LE JOURNALISTE

Son premier souci, totalement justifié, est de trouver un support qui lui permette de vivre. Avec toutes les nuances possibles entre les deux extrêmes, on trouve ainsi une multitude de types de journalistes, avec, aux extrêmes :

- ceux qui sont employés par des revues de vin, lesquelles leur laissent soit une totale liberté par rapport aux annonceurs, soit, très gentiment ou non, savent leur dicter de temps à autre la nécessité de bien parler de telle ou telle appellation, de tel ou tel domaine. 

- ceux qui montent leur propre support, lesquels, de facto, ont, à tort ou à raison, un supplément d'objectivité dû à l'absence de publicité. On pense ici naturellement à une publication comme LE ROUGE ET LE BLANC (ICI).

- ceux qui ne sont plus sous un support papier, mais qui travaillent, souvent comme pigistes, discrètement ou non, pour des entités de relations publiques spécialisées dans le monde du vin. 

Chacun aura compris que pour les journalistes, affirmer sa totale indépendance, quelque soit la catégorie où il se situe,  n'est pas toujours facile et requiert une force de caractère peu commune. Mais il y en a.

POUR LE BLOGGEUR

Rarissimes sont les bloggeurs capables de dire des choses intelligentes sur plusieurs régions, sur plusieurs pays. Les deux Nicolas (ICI) sont l'exemple de l'exception (mais ils vous diront que ce n'est pas un blog). Généralement, le bloggeur est plus ou moins spécialiste d'un secteur précis. La plupart du temps il est simplement limité dans ses billets par les vins qu'il déguste, quand bien même il y a des zozos capables d'écrire des choses sur des vins qu'ils n'ont jamais dégustés.

:-)

Voilà une première différence fondamentale avec les journalistes lesquels donnent bien plus de temps à ce travail d'analyse et reçoivent régulièrement des invitations à des salons, des visites de régions ou de propriétés.

Le bloggeur est donc plus sur un socle d'enthousiasme, positif ou négatif, et cela peut lui donner assez bizarrement une aura d'objectivité qui chagrinera certains journalistes toujours suspects, pour bien des lecteurs, d'intérêts douteux.

Ne chipotons point : il y a maintenant, en France, en Europe des bloggeurs plus suivis et respectés que bien des journalistes. C'est plus un effet du besoin de communication via des outils du moment qu'un rejet du journaliste. Ce n'est pas tant sa personne qu'on rejette, mais bêtement, son support : le papier.

Un souhait ? Comme le propose MABULLE qui est le support technique de ce blog, ce serait bien que tous ces bloggeurs acceptent la mise en ligne du nombre de leurs lecteurs. Une superbe leçon de modestie, croyez moi !

LES FORUMS

C'est le support de polémiques où on trouve facilement, sur tous les sujets traités, des pour et des contre, le tout aggravé par le fait que ceux qui y écrivent sont soit anonymes (je déteste), soit inconnus des lecteurs épisodiques. C'est souvent un lieu de passage mais il est difficile d'en tirer de quelconques conclusions d'influence. 

Aux USA, c'est différent. Les forums dont l'exemple majeur est WINEBERSERKER, (ICI) ont une réelle influence sur le marché comme l'avait, dans les années 80 à 2000 le forum de Parker qui a perdu pratiquement tous ses membres influents le jour où il est devenu payant !! 

Et le jour où LPV interdira les anonymats, les choses changeront. Mais stop ! Sujet trop sensible au pays de la CGT.

LA REALITE DES CHOSES

Qu'on l'aime ou pas, le monde actuel est avant tout un monde de communication non seulement rapide mais tellement éparpillé. Pratiquement plus personne ne prend le temps de bien chercher, de lire en entier des analyses pourtant intéressantes. C'est le temps de ce qu'on appelle les réseaux sociaux, un fourre tout où le n'importe quoi côtoie le faux, la pub cachée, le fait non vérifié. Devant cet état de fait affligeant, ceux qui veulent véritablement dire des choses sensées vont le faire sur d'autres supports. Il y a là un effet mouton de Panurge détestable et FaceBook en est un exemple criant alors même que ce pourrait être un outil de première qualité pour autant que chacun y respecte certaines règles. On en est loin, très loin.

LE FUTUR POSSIBLE

Comme il est hors de question de pouvoir réduire ces côtés instantanés, rapides, immédiats souvent inconséquents qui sont la base de toute recherche d'informations, et comme les nouveaux outils sur base de tablettes ont des capacités extraordinaires de contenus - textes, images, vidéos - , la communication du vin va se développer vers de nouveaux horizons.

D'un côté, il y aura des niches où des amateurs vont faire confiance à des professionnels discrets et compétents - je pense là à un site comme CHAI D'OEUVRE - , et de l'autre de nouveaux outils comme VIVINO, une application qui vient de lever plus de 30 millions de $ pour devenir le n° 1 du secteur. Son créateur et CEO, Heini Zachariassen sera un des conférenciers cette année à notre événement à Villa d'Este. S'il est vrai qu'en ce moment l'argent à 0 % coule à flot ici ou là, le fait que des financiers mettent autant de billes dans un tel produit montre à l'évidence à quel point on a compris chez eux ce qui sera le futur de la communication du vin. Essayez simplement de monter un financement pour un nouveau journal : vous pourrez alors peser douloureusement cet état de fait.

Si le monde du vin adhère à une telle évolution, il est évident qu'il devra se rapprocher des initiateurs de ces nouveaux outils, de ces applications bon marché ou même gratuites, afin d'y inclure ses propres informations objectives telles qu'on les trouve maintenant sur les sites des producteurs. Etiquette en tête.

Bon : tout cela est en mouvement type maelström, ça bouge de tous les côtés, il y aura des couacs et des réussites inattendues.

In fine réussiront ceux qui sauront associer une multitude d'informations superbement présentées en quelques clics permettant aux amateurs des décisions d'achat, de consommation qui les satisferont sans les obliger à lire les gros dictionnaires de vin ou à passer une heure sur Wikipedia. Et là, on revient au premier § : "POUR LE PRODUCTEUR".

Je rassure les zeus de ma génération : on aura toujours un grand plaisir de lire, relire le Lavalle ou autres Camille Rodier.

A nous de les garder soigneusement en bibliothèque, pas vraiment pour la génération actuelle des 20/40, mais, espérons le, pour les petits enfants de cette génération. Chiche qu'ils reviendront aux livres comme certains reviennent maintenant aux 33 tours sur des platines valant de petites fortunes ! 

Toute une époque…

Va savoir, Charles !

:-)

PETITE COUCHE POLITIQUE DU JOUR : LE BREXIT

Que de tartines usagées ne nous sert-on pas sur la catastrophe à venir si jamais le Royaume Uni quitte l'Union Européenne. C'est simplement effarant cette menace d'apocalypse ! 

Remettons en mémoire la veille de l'an 2000. Tous les ordinateurs allaient péter les plombs, le système allait s'écraser, cela allait coûter des milliards de milliards. Résultat des courses ? Quelques ajustements et tout est reparti comma avant.

Laissons donc nos amis britons décider de leur sort. La France importera toujours du whisky,  eux du bordeaux et des parfums, les allemands et italiens des jaguars et le tourisme réciproque continuera de même. Cerise sur le gâteau : ce sera peut-être l'opportunité pour les 6 ou les 8 de se resaisir, de bien dire qu'une gestion à 28 à l'unanimité, c'est pas possible, et donc qu'il faut repartir sur des rails neufs.

Mais bon : là, le fédéraliste éduqué par Guy Hayraud que je suis, rêve, rêve…


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