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N° 26 de la revue VIGNERON

Par Mauss

Que de progrès depuis le n° 1 ! Pour € 10, vous avez dans ce dernier opus 217 pages où il n'y en a aucune qui soit d'un niveau secondaire. Une totale réussite : un grand bravo à l'équipe rédactionnelle et au travail plus que remarquable d'Orianne Nouailhac.

Justifié cet enthousiasme ? Que oui ! Même la page sur Alfa Roméo mérite lecture. Comme celle de François Audouze sur un Haut-Bailly 1918 : qui d'autre que lui peut aligner ainsi, avec une constance plus que remarquable, des notes de dégustation qu'aucun anglo-saxon historique ne serait capable d'aligner avec autant de passion ?

:-)

Dans le désordre :

A : Un article de coeur de Margeon sur la colline de Corton, une appellation, selon lui, sous-estimée alors même qu'elle est quelque part l'alliance heureuse du plus beau de la Côte de Beaune et du plus beau de la Côte de Nuits. Je me permets de citer les derniers mots de Margeon (page 16) :

"C'est une synthèse plénière de TOUTE la Bourgogne"

Pour compléter cette ode à cette colline si majestueuse, on trouvera de la page 78 à 107 une présentation complète des domaines phares travaillant ces grands crus, en blanc comme en rouge. Rien que ces pages méritent l'achat de cette revue dont l'iconographie est simplement stupéfiante. 

Hasard des choses : il y a deux jours, Laurent Vialette nous a offert, à l'aveugle, au restaurant Montrachet à Puligny, un rare Corton Grancey 1961 de la Maison Louis Latour qui a suscité l'enthousiasme de toute la tablée. Comme quoi, dans des millésimes reconnus, certains ont réussi des cuvées enthousiasmantes qui tiennent plus de 55 ans ! ! 

ôihô

Même le samsung tremble devant tant de beauté :-)

B : On sait à quel point Jean-Paul Kauffmann, créateur d'une revue mythique : "L'Amateur de Bordeaux" (sans oublier L'Amateur de Cigare) a été meurtri lors de son enlèvement au Liban en 1985. Sa vie en a été bouleversée et il s'est mis un peu en retrait du monde, mais en n'oubliant jamais sa passion du bordelais. De la page 38 à 44, il nous donne un sommet de la culture du vin. Une leçon majuscule.

Je me permets de citer quatre extraits : 

"Il y a vingt ans on disposait de 200 mots pour décrire le vin. Il y en aura bientôt 1.500. 20 mots suffisent. Nous avons atteint les limites de l'excès, de l'enflure et du surenchérissement".

Dire que je suis d'accord avec cela à 200 %, c'est être très en-dessous ce ce que je pense depuis des lustres !!!!

D'un point de vue éthique, dépenser une somme exorbitante pour un vin, même remarquable, abîme mon plaisir esthétique."

Là encore, une phrase à méditer et qui méritera, un jour, de beaux développements sur ce blog.

"Bordeaux c'est la lenteur, l'attente. On sabote ces vins en les dégustant trop tôt. Même si une nouvelle oenologie a contribué à les assouplir".

"J'en ai assez de ces dégustations où chacun rend un verdict, ces combats de coqs où le savoir de l'un vient en désaccord de celui de l'autre".

+100 !!!!!!

C : Yquem : dieu sait qu'il y a eu ici et là des pages et des pages écrites sur Yquem. Il est vrai que ce cru du sauternais fait partie des 5 plus grands vins blancs du monde : où personne n'oubliera d'inclure le Montrachet, le Riesling Scharzhofberger Auslese d'Egon Müller et la Coulée de Serrant de Nicolas Joly. Si Pierre Lurton reste l'ambassadeur, le nonce du domaine, c'est une dame, Sandrine Garbay qui est aux commandes. Ce qu'elle est en train d'accomplir à Yquem - et qui sera l'objet d'un atelier au prochain Villa d'Este Wine Symposium en novembre - est unique : mettre de plus en plus en valeur la finesse et la fraîcheur du cru sans qu'Yquem perde son intemporalité. On attend avec impatience ce moment de culture et à quel point une jeune génération s'implique corps et âme dans ces pages d'histoire des grands vins. Sûr que cet atelier à Villa d'Este fera complet !

D : Champagne : toujours des pages importantes sur cette région. Outre une présentation complète de Billecart-Salmon, la couverture est une belle photo de Pascal Agrapart (page 109 à 116), le nom qui monte comme on a eu en son temps le géant Anselme Selosse.

Egalement 2 pages sur le clos rarissime "Vieilles Vignes Françaises" de Bollinger : "Issue des seules vignes préphylloxériques qui subsistent en Champagne".

E : Le Jugement de Paris : les amateurs savent à quel point cette initiative de Steven Spurrier, en 1976, a été un sacré coup de pied dans la fourmilière des certitudes françaises : oui, des vins américains pouvaient battre, en dégustation à l'aveugle, les plus beaux noms des vignes bordelaises ou bourguignonnes. Si le choix des vins, surtout des millésimes, a été souvent critiqué (et ici sur ce blog), il n'en demeure pas moins que cette dégustation historique a initié ensuite de belles initiatives comme celle de Luxey qui a été continué par le Grand Jury Européen.

Je cite Eric Riewer, auteur de l'article :

"D'abord une dégustation à l'aveugle est souvent une leçon d'humilité. Ensuite, cela permet de rappeler à bon escient que ce qui compte le plus avec un vin n'est pas le nom sur l'étiquette mais le contenu de la bouteille".

"Le plus" ne veut pas dire "le tout" comme l'a si bien expliqué Michel Bettane (première PLUME D'OR :page 28) dans un édito de l'autre revue majeure du vin : The World of Fine Wine.

F : Les vins nature : je ne connais pas Jérémy Cukierman,mais ce qu'il écrit sur les vins nature (pages 30 et 31) : chapeau ! Enfin, un papier hors de positions fanatiques.

G : Marionnet (page 52) : voilà un homme à qui on ne le fait pas, qui sait ce que "vin" veut dire, et qui a donc la charge de développer la vigne du Château de Chambord. Non seulement il cultive le rarissime cépage Romorantin, pré-phylloxérique, mais c'est lui qui a également produit une cuvée unique de Gouais (ICI).

H : Méli-mélo :

Sylvain Huet nous explique le saké (pages 58 et 59)

• Jérôme Banctel, ancien de Senderens, le chef de la Réserve, le nouveau palace parisien juste en face du Laurent :il sait comment tenir un verre de vin :-) et qui aime Cos d'Estournel y trouvera moult millésimes (le propriétaire des lieux est celui de ce cru classé : Monsieur Reybier)

• La cave de Ribeauvillé, une coopérative qui donne une excellence à ce type d'entité collective (magnifique photo pages 122-123)

• Le Domaine Dujac qui a quelques étoiles dans ses caves

 • Marion Cirino, restauratrice (Hostellerie Jérôme à La Turbie) dont je cite une phrase qui me plaît :

"Je déteste les coefficients multiplicateurs qui transforment les cartes des vins en vitrine interdite aux enfants pauvres".

Rien que cela doit mériter de voir sur place comment cela fonctionne, surtout qu'il y a des Coche-Dury, des Mugnier, du Clos Rougeard, du Chave, du Rayas :-)

• Eric Monneret qui réveille un bijou endormi de Pomerol : Château La Pointe (pages 166 à 171)

• Un spécial Languedoc avec quelques domaines phares comme Mas jullien

Pour finir, chacun connaissant ma passion pour les administrations françaises, ce petit coup de gueule de papa  Nouailhac :

"Un vigneron bien connu s'était retrouvé un jour au pénal parce que le fils de 14 ans de l'un de ses vendangeurs d'un village voisin avait accompagné son père et lui avait demandé, pendant une pause, de lui montrer comment on coupait les raisins. Manque de chance, les contrôleurs et les gendarmes avaient débarqué à ce moment-là et notre vigneron, atterré et effondré par tant de mauvaise foi, avait été poursuivi pour "emploi d'un enfant mineur non déclaré" un crime que l'administration ne pouvait pas laisser passer, n'est-ce pas ? Que faire contre la bêtise des primates, l'acharnement des jaloux et la violence légale de contrôleurs aigris ? Nous sommes en France, que diable, et force doit toujours rester à la loi !"

SIC :-)

On m'a bien compris ? Voilà € 10 qui ne seront pas bêtement utilisé : chiche qu'il vous arrive d'avoir des dépenses moins justifiées.

:-)


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