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Le jeune Ahmed

Par Kinopitheque12

Luc et Jean-Pierre Dardenne, 2019 (France, Belgique)

Le jeune Ahmed

Le jeune Ahmed, 13 ans, s'est déjà engagé dans la radicalisation. Il est encore présent aux cours de quartiers où les enseignants aident aux devoirs et font apprendre à qui le demande le français ou l'arabe. Mais l'esprit d'Ahmed est ailleurs, tourné vers une religion et ses dérives. [lien cinétrafic : Quel est le dernier bon film des frères Dardenne ? ]

Le garçon n'a réellement d'attention que pour son imam auprès duquel il se réfugie et qui l'incite à la haine. Mais pressé d'agir, le disciple prend l'initiative au nom d'un cousin mort au djihad et au nom d'un monde d'illusions façonnées par l'intégrisme, ses moyens de persuasion et une fermeture radicale à l'autre. Il n'écoute ni sa mère, juge sa fratrie selon ses propres valeurs d'intolérance et, dépassant son imam, Ahmed se met dans l'idée d'assassiner son enseignante. Le gamin échoue dans la mission qu'il s'est assigné et est envoyé au centre de détention pour mineur. Le récit se vuet biensûr très réaliste et le film a les qualités qui fait le cinéma des frères Dardenne : clarté, sobriété et justesse des situations.

Le récit se concentre ensuite sur les dispositifs de déradicalisation mise en place, à savoir les échanges établis avec les éducateurs et une psychologue et un réapprentissage des liens sociaux par un travail collaboratif dans une ferme. Le hasard d'une rencontre fait penser qu'Ahmed pourrait tomber amoureux et changer. Mais rien n'est aussi simple et le garçon au contraire cherche à tirer ce amour ébauché vers l'intégrisme qu'il entretient malgré tout et cache désormais. Quelle rédemption possible alors ?

Il faut qu'un accident arrive pour que les Dardenne puissent laisser Ahmed sur le dos paralysé (à cause d'une chute). Dans sa détresse, il appelle d'abord sa mère plutôt qu'Allah. Mais c'est son enseignante, sa victime qui avait pourtant été traumatisée par sa tentative d'assassinat, qui le trouve par terre et lui porte secours sans hésiter. C'est de la compassion qui sauve Ahmed et c'est la peur de mourir qui nous fait croire à son probable changement de comportement.

Il y a cependant une certaine facilité à finir le film à ce moment-là. Car Ahmed est tombé alors qu'il avait fui et se trouvait là pour tenter à nouveau de tuer son enseignante, projet auquel il n'avait jamais renoncé. Pour éviter ce problème, le récit aurait dû aller au-delà et se confronter à l'état de cette victime qui apprend qu'elle a sauvé l'adolescent alors qu'il cherchait encore à lui nuire. Ou bien ce personnage aurait dû comprendre ce qu'était venu faire Ahmed au moment de le sauver. La compassion n'en aurait été que plus réelle. Or, sans résoudre vraiment la question, le film paraît inachevé. Le récit demeure en suspens et nous fait par conséquent préférer sur ce thème des comportements humains confrontés à la radicalisation, les films de Philippe Faucon, La désintégration, en 2011, et Fatima, en 2015. Le jeune Ahmed, lui, manque in extremis de confronter ses personnages principaux au nœud du problème alors que toute leur relation devrait, me semble-t-il, en dépendre. On ne peut pas reprocher aux Dardenne de ne pas rendre leur récit suffisamment intense car, sans être un film d'action, il n'en demeure pas moins prenant ; seulement de ne pas être aller cette fois jusqu'au bout du problème.


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