Stanley Donen, 1950 (États-Unis)
Fred Astaire, du sol au plafond, danse. Tom Bowen est amoureux de Anne, il danse et défie les lois de l'apesanteur. Astaire danse sur les murs et c'est naturel. Mariage royal a été le film le plus vite tourné d'Arthur Freed, 33 jours de tournage et même 6 jours d'avance sur le planning. La préparation du film ne laissait toutefois pas deviner au célèbre producteur que tout allait être finalement si simple.
En amont, Freed avait corrigé le scénario de Lerner. Il s'inspirait de la vie de Fred Astaire et de sa sœur Adele mariée à un lord. Les auteurs profitaient du mariage récent, en 1947, d'Elisabeth d'Angleterre avec le duc d'Édimbourg et pouvaient ainsi clore le récit, non pas sur deux, mais sur trois mariages, les deux couples vedettes et la princesse anglaise. Coté casting, les protagonistes royaux n'ont pas posé trop de problème : la couronne avait cédé ses archives du mariage en technicolor (après, toutefois, des corrections apportées aux dialogues, afin d'éliminer les américanismes les plus déplaisants aux oreilles de Windsor). De même, pour interpréter la danseuse dont Fred allait tomber amoureux, engager la fille de Winston, Sarah Churchill, posa moins de difficultés que de trouver celle qui jouerait sa sœur (Astaire avait quand même dit non à Moira Shearer).
Les problèmes commencèrent vraiment lorsque June Allyson, pourtant assez tôt sur le projet, tomba enceinte (June Allyson qui venait d'incarner Jo dans Les quatre filles du dr March de LeRoy, 1949). Judy Garland, elle, fit trois semaines de répétition mais, dans une mauvaise période de sa vie, elle ne se sentait plus capable de poursuivre (alors qu'elle venait aussi d'abandonner Annie, reine du cirque, 1950). Jane Powell, la troisième sur le rôle, la remplaça finalement (elle est chanteuse et c'est un peu sirupeux, mais l'actrice sait donner un franc tempérament à son rôle). Entre temps, le réalisateur Charles Walters qui venait de terminer La jolie fermière (1950) avec Judy Garland, préféra refuser le poste et préserver sa santé mentale plutôt que d'avoir à composer à nouveau avec la fragilité de l'actrice. Arthur Freed confia donc à Stanley Donen sa première réalisation seul, puisque Un jour à New York avait été co- réalisé avec Gene Kelly (1949).
Au final, le film encore en préparation avait un peu l'allure du bateau en plein tangage que l'on voit dans une scène. Astaire, lui, quelles que soient les situations, continuait à danser : en plein décor caraïbéen sous les tropiques, avec un porte-manteau dans une salle de sport, dans un duo burlesque en tenue de malfrat ou lors d'un bal en plein océan, il s'accommode de tout. Malgré la houle, Fred Astaire danse, fait avec les secousses et intègre les glissades à sa chorégraphie. Même dans une boîte, du sol au plafond, et toujours avec classe, il danse.