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Vandana Shiva : pour une consommation responsable

Par Beena

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Pour une consommation responsable

Elle porte le nom du dieu de la destruction. Elle aurait pu être sa parèdre, cette Kali au sari de coton qui n’hésite pas à soulever des foules immenses à travers le monde pour défendre sa cause, à mobiliser les consciences à travers les réseaux sociaux, les conférences, les livres, les films et autres médias, à créer des banques de graines (près de 120), à parcourir des kilomètres pour rencontrer petits paysans et fermiers. Elle, Vandana Shiva, est une héroïne des temps modernes qui se bat pour le droit le plus séculaire et le plus coutumier : perpétuer les espèces végétales en ayant un droit de regard sur les espèces cultivées, sans forcément utiliser d’engrais chimiques pour les voir pousser, sans forcément s’endetter auprès des banques et des semenciers, sans payer de taxes, ni de redevances en les utilisant. Cela découle de la responsabilité des cultivateurs qui ont pour mission d’assurer la sécurité alimentaire de tous en pourvoyant une nourriture saine et variée.

A l’instar de Kali et de Shiva qui détruisent pour mieux régénérer, Vandana Shiva, docteure en physique quantique et en philosophie, fille d’un garde forestier et petite-fille d’un activiste décédé à la suite d’une grève de la faim (il défendait la scolarisation des filles), voue toute son énergie pour les droits de l’Homme avec un grand H… Et non le droit de ces multinationales qui agissent en loups pour l’Homme.

Prendre conscience des enjeux

Il faut être clair sur un point : Il n’y a pas plus machiavélique et contre-nature que le brevetage des graines. Au nom de quoi ? De qui ? En effet, la pollinisation n’est t-elle pas quelque chose de vitale, de naturelle ? Les graines sont d’abord des inventions de la nature et non celles de certaines multinationales qui pensent que les breveter, c’est avoir la mainmise sur l’alimentation et toutes les modes de consommation humaine.  Le monde se portait en effet beaucoup mieux sans ce genre de chimie.

Aussi, certaines industries dont nous consommons quotidiennement les marques ont pour objectif de restaurer l’esclavagisme alimentaire vis-à-vis de ceux qui produisent, mais également de ceux qui consomment. Soutenus par des administrations soit naïves, soit corrompues, elles amènent les fermiers, ces garants de la biodiversité, à acheter des graines résistantes certes à toutes sortes de maladies mais à usage quasi unique. Contrairement aux graines « naturelles », leurs semences sont non reproductibles d’une génération sur l’autre. Fragiles, elles ne s’adaptent pas à tous les milieux. Ce qui amène également l’utilisation d’intrants et d’herbicides qui leur sont associés pour favoriser leur pousse. Sans compter qu’avec l’effet « antibiotique », les parasites qui affectent les plantes deviennent plus résistants.  Les exploitants qui se sont tournés vers les monocultures à coup de promesses d’achat des industries de l’agro-alimentaire sont donc amené à racheter des graines d’une année sur l’autre. Et d’être dépendant d’eux. C’est donc le drame dans le cas d’intempéries. Dans le cas où l’usine n’achèterait pas toute ou une partie de leur mono-culture. Et de dettes car ces industries là, tout comme les banques, ne font pas de cadeaux. En Inde, selon les statistiques officielles, 284 694 fermiers, dos au mur, se sont suicidé entre 1995 et 2012(1). La plupart venaient de la « ceinture du coton ». En Inde, 95 % du coton proviennent d’OGM (2). Dans ce pays qui frôle parfois 9% de croissance par an, l’UNICEF constate qu’une indienne sur trois est sous alimentée et que 42 % des enfants souffrent de malnutrition(3).  Un comble non ?

Le livre d’entretiens de Lionel Astruc interroge Vandana Shiva sur sa cause, ses méthodes, sa vision. Redoutable, l’écoféministe, prix Nobel alternatif, pointe également le doigt sur nos propres responsabilités en tant que consommateurs.  En effet, par nos achats quotidiens, nous sommes les acteurs de notre temps. Un peu comme l’effet papillon, ce que nous consommons ici agit sur la production là-bas. Un produit boycotté cesse forcément d’être vendu selon toute logique économique. Raison de plus d’encourager des filières plus équitables, plus vertueuses, plus qualitatifs qui ont un effet d’autant plus considérable sur notre santé et notre bien-être.

Cela nous concerne donc tous.

Nourjehan Viney  

VANDANA SHIVA Pour une désobéissance civile

Lionel Astruc

Actes Sud, Domaine du Possible, nov. 2014

NB : Toutes les références  proviennent du livre « VANDANA SHIVA Pour une désobéissance civile » de Lionel Astru (Actes Sud, Domaine du Possible, nov. 2014).

National Bureau of Crime Records 2012 (p99-100 du livre cité) (2) Cf Question de Lionel Astruc  p 115 du livre cité. (3) The HUNGama Survey report, figting hunger and malnutrition(p 38 du livre cité)


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