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Domaine de la Romanée-Conti au VDEWS

Par Mauss

Afin de préparer notre dossier sur les trois dégustations de prestige qui sont proposées cette année lors de la sixième édition du Villa d'Este Wine Symposium, je me suis permis de demander à Michel Bettane un texte de présentation sur le Domaine de la Romanée-Conti ainsi que, le cas échéant, ses notes de dégustation sur les crus qui ont été choisis.

Je ne doute pas une seule seconde que ses vues sur ce Domaine et ses crus, qu'il connaît si bien depuis de si longues années, associées à sa passion et à sa connaissance unique de la région, font de cette présentation un texte qui doit retenir l'attention des amateurs.

C'est simplement remarquable. Merci Michel pour ce commentaire de référence.

© Michel Bettane Domaine de la Romanée Conti   
Le domaine de la Romanée-Conti, de l'avis unanime le plus prestigieux de la Bourgogne, a la chance d'exploiter en propriété ou en fermage plus de 23 hectares de vignes dont onze grands crus. Seuls huit de ces grands crus donnent lieu à une mise en bouteille du domaine, car le Bâtard-Montrachet n'est jamais commercialisé et les trois parcelles de Corton (Bressandes, Renardes et clos du Roi) sont réunies en une seule cuvée comme la loi l'autorise parfaitement.  Cet ensemble est ce qui reste de l'énorme domaine constitué à la fin du XIXème siècle par Jacques Duvault-Blochet à Santenay qui avait attendu l'extrême fin de sa vie pour acquérir en 1869  la Romanée-Conti, couronnement de son œuvre,  après sa mise en vente par les héritiers du banquier Ouvrard. Dans les deux générations qui ont suivi les vignes de Volnay, Pommard et Santenay ont été vendues et forment aujourd'hui l'essentiel du célèbre domaine de la Pousse d'Or. En 1911 le grand père d'Aubert de Villaine, un des deux administrateurs actuels du domaine, transfère l'exploitation et la vinification à Vosne-Romanée, en toute logique, car toutes les vignes se trouvaient désormais sur ce village. Le domaine s'agrandit par l'achat de la Tâche, dans sa délimitation d'origine, à la famille Ligier-Belair, qu'il agrandit par l'addition de la vigne voisine des Gaudichots qu'il possédait déjà. Au milieu des années 1960  s'ajoutent trois parcelles de Montrachet, et une toute petite de Bâtard-Montrachet, situées sur la commune de Chassagne-Montrachet,  puis dans les années 1980 la totalité des parcelles de Romanée-Saint-Vivant appartenant à la famille Marey-Monge que le domaine avait en fermage. Il ne reste donc en fermage qu'une petite partie des Grands Echezeaux, tous les Echezeaux, et les trois parcelles de Corton appartenant à la famille De Mérode.  Le style des vins du domaine
Les vins du domaine possèdent une inimitable signature aromatique née d'une très longue tradition continue, contrairement à la majorité des bourgognes d'aujourd'hui, liés aux vicissitudes de l'histoire avec de nombreux changements de propriété. Le domaine a gardé le sens des valeurs de viticulture fondées sur la notion de petit rendement, de conservation des vieilles vignes et du patrimoine génétique qu'elles représentent, du respect du sol, de la plante et de l'environnement, d'une vendange rentrée à maturité aussi accomplie que possible. Le domaine égrappe le moins possible sa vendange, bénéficie d'une qualité naturelle dans ses ferments qui fait l'admiration de bien de ses confrères car elle donne à tous ses vins une distinction et une pureté de parfum inoubliables. Pour contrôler pleinement la qualité de ses barriques le domaine achète ses propres bois, les fait sécher autant qu'il est nécessaire, et reste particulièrement attentif à la proportion de bois neuf utilisée et à la longueur des élevages. La mise en bouteille se fait en petits lots pour chahuter le moins possible le vin et le cahier des charges imposé aux fournisseurs de bouchon est un modèle du genre, ce qui hélas n'évite pas quelques accidents, même s'ils se font vraiment très rares depuis cinq ans.
Le Montrachet
Cette toute petite cuvée (à peine 2000 bouteilles !) provient de 3 parcelles (deux principales et une toute petite) situées sur Chassagne, voisines de celles des comtes Lafon et du domaine Jacques Prieur, touchant  dans la partie haute le secteur dit des « dents de chien », avec une exposition un peu plus purement sud que dans les parcelles de Puligny. La vigne y est vieille et peu vigoureuse avec des petites grappes qui contrastent hélas avec les grosses grappes de certains clones plantés dans le voisinage.  Le domaine aime  cueillir ses raisins blancs très mûrs, profitant pleinement de la perfection de l'exposition, et vendange parmi les derniers, au risque totalement assumé de rentrer quelques raisins botrytisés qui contribuent dans certains millésimes à l'onctuosité et au parfum merveilleux de la cuvée.
La Romanée Conti
Cette vigne mythique se situe au cœur de la côte des grands crus de Vosne-Romanée, au milieu de la pente et bénéficiant de l'exposition la plus parfaite. 1,8 hectares seulement, produisant en moyenne 4 à 5 mille bouteilles. La vigne a été arrachée après la récolte 1945, et n'a redonné de vins qu'à partir de 1952. Un programme très précis de replantation à partir de matériel végétal issu du même cru préservera pour au moins deux générations une moyenne d'âge de 60 ans pour les vignes et donc la continuité de la texture et du parfum sublimes du vin. Dès sa naissance le vin de la Romanée-Conti frappe par une touche florale et épicée donnée par un raisin encore plus parfaitement mûr que dans les autres grands crus du domaine. Dans certains millésimes ce parfum rappelle de façon surprenante et paradoxale des notes de poivron très fin qui iront après 25 ans, comme pour les 1978 ou 1985 aujourd'hui vers l'essence de rose ancienne. Quant à la texture et à la présence en bouche elles captivent par leur côté faussement aérien qui en fait cache une densité de corps permettant les plus longs vieillissements.
Les Millésimes  
Romanée Saint-Vivant et Echézeaux  2006
Vendanges 23, 25 et 27 septembre. Année curieuse mais passionnante en côte de Nuits avec un mois de juillet caniculaire, et un mois d'août frais et pluvieux, suivi de très beau temps en septembre. Un peu de stress hydrique donc et inversement une tendance au botrytis ce qui a demandé un tri de vendange précis. Mais en fin de parcours un beau raisin mûr, certes aux peaux moins parfaites que 2005 mais le cœur a ses raisons... Les vins du domaine sont très « artistes » avec des parfums merveilleux et une texture de soie sur un tannin ferme et un boisé de fort soutien dans un équilibre qui n'appartient qu'à lui.
Romanée Conti  2001  
Vendanges du 24 au 30 septembre. Année un peu chaotique avec une floraison froide, une humidité assez constante pendant le cycle végétatif qui a encouragé la pression du mildiou mais tout compte fait un ensoleillement plus que convenable. Il fallait simplement trier des raisin hétérogènes dans leur maturité et ne savoir garder que les baies bien mûres, ce que le domaine a fait en passant dans les rangs à deux reprises. A la naissance les vins avaient beaucoup de charme et de raffinement aromatique et devraient en principe faire des bouteilles de grande élégance en côte de Nuits. La côte de Beaune a eu droit à des orages de grêle en août et a moins profité du mois de septembre.
Romanée Conti 1991
Vendanges début octobre perturbées par des pluies à partir du 5 mais pratiquement tous les raisins étaient rentrés. L'année a connu le gel en avril mais sans grand dommage, deux grêles en juin et août plus violentes au nord sur gevrey, morey et chambolle que sur vosne, réduisant un peu le volume de la récolte mais bien moins qu'en bordelais par exemple. Ce type de millésime qui ne stresse pas trop et ne connait pas l'échaudage des raisins est souvent favorable au pinot noir : il développe mieux qu'en année chaude sa finesse de parfum et les nuances du terroir. Dans de nombreux domaines de la région les 1991 ont mieux évolué que les très célèbres 1990. Ce n'est pas trop le cas au DRC qui a produit des 1990 monumentaux mais ses 1991 ont plus de charme immédiat à l'ouverture de la bouteille sans manquer de corps et de longueur, et atteignent désormais leur apogée alors que les 1990 vieilliront un demi-siècle ou plus.
Romanée Conti 1971   
Toute petite récolte (22hl/ha) car la grêle a durement touché toute la côte de Nuits un peu après le 15 août. On a vu quelques domaines enlever les raisins les plus abîmés à la pince à épiler ! Mais ce qui restait sur les pieds a profité de conditions climatiques superbes pendant la vendange avec une forte montée finale des richesses en sucre, parfois au dessus de 14° pour le pinot noir ce qui en fait le millésime le moins chaptalisé depuis 1964 ! Les vins réussis ont de la puissance, beaucoup de volume de bouche, un caractère chaleureux dû à leur niveau d'alcool. Les vins issus de raisins non égrappés montrent plus de fraîcheur en fin de bouche que les autres. J'ai des souvenirs émerveillés de la Tâche, la Romanée-Conti divisant les dégustateurs les anglais lui trouvent un petit goût de grêle (mais je crois que c'est « intellectuel » !), d'autres un caractère de surmaturité moins élégant qu'ils ne le souhaitent, mais pour ma part la seule fois où je l'ai dégustée son caractère spécial d'année chaude m'a enchanté. Je n'y ai senti aucun caractère de grêle, contrairement à 1983. On aura sans doute les mêmes débats avec les 2003 !
Romanée Conti 1961
La célébrité des Bordeaux du millésime a beaucoup fait pour celle des Bourgognes mais dans les deux cas j'ai souvent préféré 1959 ! Pour la Romanée-Conti cela peut se discuter car ce fut une vendange relativement tardive (7 octobre) et peu abondante aussi en raison de la coulure des raisins au moment de la floraison. Année de millerandage donc contrairement à l'abondance du 1959, et vins corsés, tendus, colorés, vraiment superbes au domaine, mais avec moins de panache que les 1959.  Cela se joue comme souvent dans les vieux vins d'une bouteille à l'autre selon les caprices du bouchon mais aussi ceux de la mise en bouteille qui s'est probablement faite barrique par barrique à cette époque là.
Montrachet 2002
Vendanges du 24 septembre, les plus tardives du domaine comme souvent. Jolie récolte car la période un rien moins précoce de floraison du chardonnay a connu un temps plus chaud et un peu moins de coulure que les pinots noirs des secteurs les plus précoces. Le cycle végétatif heureux a bien équilibré et alterné soleil et pluies avec un temps parfait pendant toutes les vendanges. Le vin devrait être un classique du genre.
Montrachet 1997 Année étrange où le cycle végétatif a été un des plus longs de l'histoire car dès la floraison on a pu constater des décalages de plus de 15 jours d'une vigne à l'autre, transformant les vendanges en vrai casse -tête pour ne pas se tromper dans le choix de la maturité idéale. Le Montrachet a été vendangé en dernier le 29 septembre, une récolte somptueuse car j'ai vu les derniers raisins du secteur absolument dorés, magnifiques, et sans botrytis. Les premières dégustations ont confirmé la splendeur des blancs même si la critique internationale n'y a vu que du feu......
Montrachet 1991
Mêmes conditions que pour les rouges, mais vendange un peu plus abondante donnant pourtant des vins à forte teneur en extrait sec, idéalement équilibrés pour la garde, moins recherchés à leur naissance que les 1989 et moins estimés que les rouges. Dans le secteur sud je préfère quand même ces blancs aux rouges et les vignes les moins chargées ont donné de grands vins dont ce superbe Montrachet à l'ampleur inégalée.
Montrachet 1982   
Récolte invraisemblablement abondante en rouge, plus équilibrée en blanc. Les grands terroirs ont donné des vins blancs d'une finesse et d'un équilibre irréprochable et leur tenue au vieillissement a surpris tous les observateurs. Les rouges plus dilués étonnent parfois par leur fruité toujours intact, un peu comme les 1973.   ETIQUETTES : INTERESSANT POUR CONNAITRE LE NOMBRE DE BOUTEILLES PRODUITES
  
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