Bernard Baudry (Chinon) : (9)
Par Daniel Sériot
Présentation
et commentaire d’Isabelle
Bernard Baudry tient absolument à faire déguster La Croix Boissée 1997 à
Daniel afin de savoir si ce vin est « bretté… ».
En fait, Bernard se remet assez mal d’une déconvenue vécue lors du
passage d’un journaliste critique plutôt connu dans les rouages de la presse
spécialisée : ce dernier ayant considéré que tous les millésimes de la
Croix Boissée étaient « ethylphénolés ».
Jusqu’à présent, rien ne nous était apparu comme tel. Mais pour le
principe de découvrir ce qui a pu permettre ce jugement et d’une discussion sur
les seuils de tolérance et/ou de perception de chacun, cette dégustation s’est
voulue didactique.
Les brettanomyces sont des levures naturellement présentes dans le
vignoble. De fait, vouloir les éviter à toutes fins dans le chai relève
pratiquement d’une utopie. Il convient évidemment d’une exigence sans faille en
terme d’hygiène pour que le seuil de contamination soit réduit au minimum et
pour le maîtriser.
Les brettanomyces sont généralement décelables par des déviances
aromatiques animales : sueur de cheval, urine de cheval, odeurs d’écurie.
Les molécules responsables de ces émanations, dites phénolées, sont les phénols
volatils, dont le seuil de perception le plus accessible serait celui des odeurs
animales, le moins immédiat celui des odeurs de clou de girofle par exemple et
à un degré moindre encore celui des odeurs de fumée ou de camphre.
(Cependant il est à noter que l’oïdium est responsable elle
aussi de développement de phénols, se caractérisant dans le moût par des traces
de clou de girofle et de gingembre.)
Ainsi ces senteurs gênent-elles ou non. Chacun a son seuil de
tolérance.
Pour Daniel, la Croix Boissée était-elle rédhibitoire, pour moi-même
était-elle plus qu’acceptable. Surtout s’il fallait en accord gastronomique
l’accompagner d’un gibier !
Croix
Boissée 1997
Belles effluences de sureau, de fruits noirs en écume aux confins d’un
balsamique de caractère.
La bouche apporte des saveurs épicées, de muscade, de laurier, sur un
fruit plutôt confit. Le goût de la marinade combine l’ensemble de ces
sapidités, les lient, mais se retient pour laisser clore dans la finale une
belle cerise.
Les tannins sont souples, élégants par leur fondu, pour convenir d’un
vin d’une belle texture aux équilibres aboutis.
Commentaire
de Daniel
Croix
Boissée 1997
La robe montre des signes d’évolution. Les teintes s’échelonnent sur
une palette allant du grenat à l’orangé. Le nez évoque des arômes animaux
(vieux cuir et gibier), qui dominent légèrement des parfums d’humus, de terre
fraîchement remuée, de champignons nobles (truffes ?), de fruits noirs, et
de cerises (cuites), le vin, en bouche, offre une texture assez fine, avec une
chair agréable, un corps bien constitué. Les fruits mûrs s’associent aux
saveurs tertiaires, la finale, d’une bonne persistance est assez complexe, avec
une signature minérale moins nette que celle des vins précédemment dégustés.
Les saveurs animales (jamais outrecuidantes) perdurent tout au long de la
dégustation