J'avais déjà rendu visite à Raymond et Catherine en 2010. J'y avais découvert les manti et le café arménien. Ayant une résidence secondaire en Normandie, ils m'avaient rendu visite en 2011 à Fécamp pour mon anniversaire (allez-y voir, ça vaut le coup d'oeil). Cela faisait donc quatre ans que je ne les avais pas revus, mais j'avais l'impression mercredi soir que c'était hier.
Raymond avait également invité Cédric, un autre membre du forum LPV chez qui je me rendrai deux jours plus tard pour une autre soirée mémorable. Nous avons démarré le repas avec de fins copeaux de jambons crus et cuits (d'excellente qualité). Et un Condrieu Doriane 2010 de Guigal (pas à l'aveugle).
La robe est d'un or intense. Le nez est foisonnant, baroque, sur des notes d'agrumes confits, d'ananas, de noix de coco toastée, de pêche rôtie au beurre. La bouche est ample, avec une matière opulente à l'aromatique exubérante. La finale se poursuit sur des notes abricotées et grillées. On aimerait avoir un peu plus d'acidité et de tension pour alléger tout ça. Car en l'état, ce vin paraît un peu too much, et on se lasse assez vite. Après, c'est sûrement encore un peu jeune. Il faudrait aussi sûrement un plat adapté (un crustacé façon thaï, avec de la mangue, du lait de coco, de la citronnelle...).
Du coup, le vin suivant a tout d'un oasis de fraîcheur. Je ne connaissais pas Darviot-Perrin, même de nom, mais ce Meursault-Perrières 1er Cru 2004 donne vraiment envie de s'y intéresser. Le nez est fin et profond, sur le citron confit, la craie humide, la noisette fraîche. La bouche est pure, tendue, d'une grande précision, gagnant progressivement en ampleur et en puissance, tout en restant très élégant. La finale est nette et fraîche, sur des notes acidulées d'agrume. Franchement bon dès l'ouverture, ce vin ne fait que s'améliorer avec l'aération et la hausse de température, pour devenir trèèès bon trente minutes plus tard. Jolie découverte !
Nous passons à table où je redécouvre avec bonheur la cuisine de Catherine. Ce carpaccio de bar sauvage mariné aux 5 épices (coriandre, cardamome, baies rose, aneth , piment d'espelette ) est un pur délice. La texture du poisson est top, avec une belle mâche, et l'huile d'olive de la marinade (italienne) est d'une douceur étonnante.
Le vin précédent eût certainement mieux convenu au plat que ce Clos de Monsieur Noly 1999 du Domaine Valette. Car on est clairement sur un Chardonnay bien évolué : la robe dorée commence à virer au cuivré. Le nez est dominé par le pralin et les fruits secs grillés. La bouche équillibrée affiche une bonne tension bien enrobée par une matière douce. La finale persiste longuement sur des notes pralinées et grillées. Ce vin a encore de (très) beaux restes, même s'il était peut-être un cran au-dessus il y a quelques années. Mais il aurait surtout gagné à être servi sur un plat qui le sublime (ris de veau caramélisé ?).
Arrive le plat suivant : un poulet à la citronnelle et au gingembre, accompagné du meilleur quinoa que j'aie jamais mangé (et pourtant, j'en mange quasi quotidiennement). C'est vrai que je fais une cuisson à l'eau, alors que Catherine a fait une "cuisson pilaf" en faisant revenir dans un premier temps le quinoa dans du beurre et de l'huile, et l'a laissé accrocher au fond de la casserole en fin de cuisson une fois l'eau absorbée, d'où une croustillance super sympa, un peu noisetée. Miam ! Faudra que j'essaie...
Raymond sert avec ce plat l'un des "super toscans" les plus réputés : Tignanello 2006. La robe est grenat sombre, limite opaque. Le nez généreux évoque les fruits noirs confits et un "boisé luxueux" (pain grillé, épices orientales, cèdre), avec une nuance patinée/évoluée et une pointe résineuse. La bouche est fraîche, tendue, enrobée par une matière veloutée bien mûre. La finale est tonique, étonnamment friande, avec ce retour sur le résineux. Un vin qui a beaucoup de choses pour plaire, et pourtant, je n'arrive pas à être totalement enthousiaste. Peut-être un manque de naturel et de spontanéité ?
Sur les très bons fromages, Raymond nous sert (en aveugle) un nouveau vin : la robe est pourpre sombre. Le nez est gourmand, sur les fruits noirs frais (mûre, cerise) et le cacao. La bouche est toute en rondeur, avec une matière dense et charnue et ce qu'il faut de fraîcheur. La finale savoureuse est marquée par des notes salines. J'ai assez de mal à le situer, avec l'impression qu'il pourrait venir d'un peu partout. Je tombe presque de ma chaise lorsque j'apprends que c'est le Moulin à vent 2009 de Jules Desjourney. Je m'attendais à ce qu'il ait une personnalité et une typicité plus marquée (d'après ce que j'en avais lu). Et surtout, ça me ferait mal de mettre plus de 30 € dans cette bouteille. On peut se payer pour ce prix plusieurs quilles plus excitantes...
Nous passons au dessert avec un crumble aux abricots et sorbet verveine-agrume. Une très belle conclusion à ce repas, avec des beaux contrastes de goûts et de textures (la photo ne lui rend pas justice...). Et bien sûr, un vin pour l'accompagner : un Malvesia delli Lipari 2003 du domaine Fenech (j'avais dégusté le très bon 2004 ICI). La robe est ambrée. Le nez hésite entre la vieille prune et muscat confit. La bouche est élancée, très fraîche, avec une matière onctueuse totalement transfigurée par une acidité traçante. La finale est nette, fruitée et épicée, sans la moindre lourdeur. On pourrait presque recommencer un nouveau repas ;-)
Merci à Catherine et Raymond
pour ce beau moment de gourmandise et de convivialité !